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11 novembre 2011 5 11 /11 /novembre /2011 09:30

Vendredi 11 novembre 2011

La CGT et le G20

 

La non-participation de la CGT aux cérémonies officielles du G20 a fait couler beaucoup d'encre. Réduite à un simple conflit personnel entre Thibault et Sarkozy, on n'a pas eu l'occasion de bien comprendre les choses.

La Confédération a donc manifestement décidé de rendre public l'affaire, par des biais officieux bien évidemment pour ne pas froisser les susceptibilités à la CSI. Et quand le blog du Monde qui a publié hier l'information se gargarise de son scoop, franchement cela fait sourire - les documents ont été diffusés à toutes les structures.

 

Bon. Lors de ce G20, il y a eu une initiative nouvelle, à savoir une déclaration commune patronat (dit "B20") et syndicats (dits "L20") réunis dans un consensus de collaboration de classe aggravé et affiché.

C'est la tendance qui va se développer inexorablement dans les mois à venir, face à la crise et aux divers plans d'ajustement structurels qui vont s'abattre à nouveau sur les travailleurs du monde.

Le capital, en période de guerre économique comme lors d'une guerre militaire, cherche le consensus national ou social (ou les deux ensemble) pour rallier les prolétaires derrière la défense du capitalisme. Et les bourgeois vont trouver à côté d'eux les réformistes syndicaux pour mater la colère et la révolte qui grondent.

La CGT a refusé cette démarche, et franchement, on ne peut que s'en féliciter.

Voici donc le courrier de la CGT expliquant son refus (original en cliquant dessus) :

 

BTG20CSI.jpg

En d'autres temps (par exemple sur les sans-papiers) la CGT n'avait pas eu les mêmes états d'âme...

Cela dit, enfonçons le clou. Pour une fois la confédération a (un peu) raison : il ne peut pas y avoir de consensus entre exploiteurs et exploités, cela s'appelle la LUTTE DES CLASSES dans une société CAPITALISTE.

Ce n'est pas seulement "inopportun" comme l'écrit Bernard Thibault, (autrement dit dans un autre contexte ce serait envisageable) c'est simplement inacceptable.

 

Mais par ailleurs, la CGT ne remet absolument pas en cause sa participation à la CSI (quartier général des syndicalistes collabos), puisque dans un document préparatoire au G20 du 17 octobre, Bernard Thibault, au nom de la CGT, se déclarait "satisfait" du projet de résolution proposé par la CSI pour l'occasion. Ce qui relativise pour le moins le désaccord rendu public.

 

BTG20CSI_2.jpg

L'explication de cette mauvaise humeur de la confédération tient dans une formule, et une perspective.

La formule c'est "notre message à l'égard du G20 doit être à la hauteur de la colère des travailleurs". La direction confédérale sent bien le ras le bol exacerbé, la colère sociale qui couve, même si ils sont en ce moment anesthésiés par la perspective électorale. Et dans la course à la représentativité syndicale officielle face au patronat et au gouvernement, elle a choisi de s'appuyer sur le mécontentement social, même si par ailleurs rien n'est fait pour lui proposer un débouché populaire satisfaisant et si au contraire tout est fait pour empêcher une explosion ou un élargissement. C'est cela qui explique les visites de Thibault aux conflits emblématiques ("Mais qu'arrive-t-il à Bernard Thibault ?")

La perspective, c'est la phase électorale de 2012, présidentielles et législatives. La direction confédérale a changé son fusil d'épaule et table désormais clairement sur la victoire de Hollande et du PS. Elle se met donc en position d'interlocuteur privilégié dans ce nouveau contexte, comme elle avait tenté de le faire avec Sarkozy en 2008/2009 ce que nous avions amplement dénoncé à l'époque ("Sarko/Thibault : le pacte de reconnnaissance tacite").

 

La CGT roule pour le PS ? Voilà qui va faire criser bon nombre de nos camarades, et c'est un peu caricatural, d'accord. Mais enfin, le discours sur la dette ressemble bien aux propositions du PS ("taxer les transactions financières"). Mais enfin, celui-ci a promis de reprendre la Sécurité Sociale Professionnelle si chère à la CGT. Mais enfin, la CGT ne réclame que le retour au droit de partir en retraite à 60 ans, comme le PS. Mais enfin, la CGT ne réclame que la régularisation des sans-papiers au cas par cas, ce qui est la position du PS... et ainsi de suite.

 

Le CCN s'est réuni la semaine dernière. Que propose-t-il ? Rien que de très consensuel et digérable par le PS.

Une journée nationale d'action pour  la défense de l'emploi industriel, mais décentralisée dans les terriroires... pas de quoi fouetter un chat et faire trembler le patronat, et en plus quoi de plus consensuel aujourd'hui, de Sarkozy à Hollande (et Marine Le Pen !) que l'emploi industriel et national.

Un grand meeting national des militants CGT pour la défense de la retraite (pénibilité, droit à la retraite à 60 ans - pas un mot sur les trimestres, retraites complémentaires).

 

La CGT roule pour le PS ? Non, d'accord, c'est un peu caricatural.

Mais elle se met en position pour la perspective du PS au gouvernement,  pour se poser en interlocuteur incontournable et responsable, le syndicat qui "obtient des résultats", et donc le seul capable de contenir le mouvement social qui gronde et va se développer inévitablement avec la crise mondiale et les plans d'austérité en cascade...

Voilà ce qui se passe en ce moment et comment interpréter ces mouvements d'humeur confédéraux.

La CGT ne quittera pas la CES ou la CSI, elle prépare les élections et la nouvelle période que cela ouvrira.

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