Vendredi 28 Mai 2010
Opéra Bastille : conflit et bousculade entre grévistes sans-papiers
Décidément, la tension monte dans le mouvement des grévistes sans-papiers, évidemment attisée par l'attitude des dirigeants de la CGT à la tête du mouvement. Le contrôle, tout le contrôle, aucun débat, aucune remise en cause des orientations que nous dénonçons sur ce blog depuis le début du mouvement.
Après l'exemple de la manifestation à Marseille, c'est un incident révélateur qui nous est rapporté ici.
A l'issue de la manifestation parisienne sur les retraites, le cortège des sans-papiers a investi les marches de
l'Opéra Bastille pour les occuper durablement (voir ICI le communiqué de la Confédération à ce propos, pour mieux comprendre). La suite, ce sont les camarades du Collectif des Travailleurs Sans-Papiers de Vitry sur Seine
qui racontent.
Le Collectif des Travailleurs Sans-Papiers de Vitry sur Seine communique :
Le CTSPV et son Comité de soutien ont mobilisé une vingtaine de camarades pour la manifestation sur les retraites.
Arrivant place de la Bastille nous avons vu un grand rassemblement sur les marches de l'Opéra.
Voulant venir en renfort de ce qui apparaissait comme une action de sans-papiers, nous nous sommes d'abord heurtés à un militant CGT qui nous a dit que nous n'étions pas désirés au sein du
périmètre. « Du périmètre ? ». Nous avons alors remarqué, qu'effectivement, des bandelettes, disposées à environ un mètre du sol, ceinturaient le rassemblement.
L'interdit semblait compliqué car ceux qui, parmi nous, faisaient partie d'une des 11 associations pouvaient passer. Les sans-papiers aussi semblait-il.
Un groupe de sans-papiers du collectif a alors
choisi de se positionner sur les marches avec la banderole qui nous avait servi pour la manifestation. Etait inscrit d'un coté « Régularisation de tous les sans-papiers » et de l'autre « On paye
des impôts On n'a pas accès aux soins ». C'est ce dernier coté qui était exposé.
Au bout de quelques minutes, les camarades ont été tirés très violemment en dehors du « périmètre », d'abord par des militants CGT, puis avec l'appui d'une vingtaine de sans-papiers.
Nous avons ensuite discuté avec des grévistes de cette mise à l'écart musclée et scandaleuse. Puis nous sommes partis, notre présence n'étant pas désirée par les organisateurs.
Ce qui s'est passé renvoie évidemment à des désaccords.
• La CGT et les 11 réclament des « critères clairs de régularisation ». Nous dénonçons l'arbitraire des préfectures mais nous ne réclamons pas de critères. Les critères, même «
améliorés » ou « objectifs », seront toujours faits pour refuser la régularisation à une grande partie d'entre nous.
• La CGT et les 11 ne parlent plus que de la régularisation par le travail et poussent les grévistes sans-papiers à chasser les CERFA. Nous nous refusons à entamer cette chasse
car elle divise les sans-papiers entre ceux, minoritaires, qui peuvent en obtenir, et ceux qui ne peuvent pas. De plus, le gouvernement favorise cette tactique car cela s'inscrit dans sa
politique d'immigration choisie.
• La CGT, en central, malgré cette récolte des CERFA (qui se périment au fur et à mesure), ne dépose pas de dossiers. Nous oui (d'ailleurs des unions locales CGT le font aussi
et Solidaires en constitue). A défaut de pouvoir obtenir des reculs du gouvernement sur les principes, il nous faut aujourd'hui obtenir les régularisations de ceux qui se sont battus.
• La CGT et les 11 tissent des alliances avec des employeurs. Nous trouvons incohérent de dénoncer le dumping social et de faire alliance avec ceux qui le pratiquent. Les liens,
il faut les tisser avec les autres travailleurs, car c'est de là que viendra la force qui fera reculer le gouvernement.
Malgré ces désaccords d'organisations, nous pensions que quand un combat est engagé par d'autres sans-papiers, il est juste de le renforcer. Les combats gagnés par les uns facilitent les
batailles des autres. Et tous, sans-papiers de tel ou tel collectif, de telle ou telle grève, nous avons intérêt à la régularisation. Pour cela, nous avons voulu appuyer l'initiative à l'Opéra
Bastille quand nous l'avons découverte en fin de manif. Mal nous en a pris.
Nous restons néanmoins convaincu que l'une des clés de la victoire est dans l'unité de tous les sans-papiers. Mais elle ne pourra se construire qu'en condamnant ce type de pratique.
Le 28 mai 2010