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15 avril 2012 7 15 /04 /avril /2012 09:14

Dimanche 15 avril 2012

Elections : Thibault vs Sarkozy ?

 

Pour finir les quelques articles relatifs à la présence de la CGT dans la période électorale ("Les sans-papiers, les élections et la CGT", "La CGT avec Mélenchon ?", "Hollande hué par la CGT de Fessenheim", "Un an après Fukushima, la CGT et le nucléaire") un dernier plus évident, autour de la polémique entre la confédration et Sarkozy.

 

Jamais les syndicats (en particulier la CGT) n'ont été aussi présents dans une élection.Nous ne le reprocherons pas, car comme le dit la direction confédérale, il est parfaitement légitime de faire le bilan concret des mesures prises par le gouvernement sortant. Celui de Sarkozy est catastrophique, il fallait aligner les faits, les rappels, les mensonges égrenés au fil des années, et c'est bien de l'avoir fait. On peut juste demander que cela soit régulièrement fait à la fin de chaque quinquennat, ceux de Mitterrand passés n'ont pas été fait, on verra bien celui de Hollande s'il est élu... Mais il est assez clair que la confédération n'est effectivement pas vraiment tout à fait indépendante !!!

 

ElectionsCGT.jpgLe bilan de la CGT (ci-contre) est clair et impitoyable, et pour ce qui est cette partie, nous pouvons le partager. Aussi ne sommes-nous pas du tout choqués que le syndicat intervienne sur le terrain politique pour dire la vérité du bilan. Nous ne partageons pas du tout (et on ne s'y attardera pas ici) l'orientation proposée par la direction confédérale, mais le bilan de Sarkozy est extrêmement brutal contre les travailleurs, extrêmement favorable au grand patronat. Dans la contradiction de classe entre bourgeoisie et prolétariat en pleine période de crise mondiale du capitalisme, Sarko a montré (pour ceux qui ne l'avaient pas encore compris) qu'il était bien le représentant des grands bourgeois (banquiers, patrons, ministres) qui gèrent le pays.

 

Ensemble47.jpgLa confédération en remet d'ailleurs une couche dans le dernier numéro du journal "Ensemble" (avril 2012) dont les deux pages centrales regroupent les "bobards" de Sarko, c'est à dire les mensonges et les promesses non tenues au fil de son mandat.

 

Le petit jeu de Nicolas Sarkozy : mon ennemi préféré.

En face, Sarkozy n'est pas en reste. De concert avec Parisot, il ré-invente une CGT de lutte de classe, drapeau rouge et poing levé, qui n'existe plus depuis belle lurette - et quelque part on peut le regretter ! ("Nicolas Sarkozy ré-invente une CGT en peine ébullition"). Il pousse même le bouchon jusqu'à mettre la CFDT dans le même sac, juste  mort de rire, même si les militants d'Arcelor Mittal méritent le respect.

On ne saurait être plus clair : Sarkozy utilise une prétendue représentation de la CGT pour se valoriser dans les milieux les plus réactionnaires et tenter d'aspirer par ce moyen, comme d'autres, les voix du FN. Gageons que s'il est ré-élu, il sera bien différent, car les gouvernements, tous les gouvernements ont besoin d'interlocuteurs pour gérer la paix sociale.

 

Le petit jeu de la CGT : mon ennemi préféré.

Soyons honnêtes : de son côté la confédération joue le même petit jeu,  pas mécontente d'être ainsi valorisée comme principal adversaire de l'ennemi détesté. Il faut voir Thibault se pourlécher les babines quand il parle des élections à une tribune, un vrai spectacle. Le 4 pages, le journal Ensemble, les articles s'empilent sur un ton vengeur ("Sarkozy s'en prend à la CGT", "Sarkozy se fiche du dialogue social" etc.), chaque camp répondant un cran plus haut aux attaques de l'autre.

Voilà qui ne peut que combler d'aise les militants de la Confédération, quelles que soit leurs orientations politiques, tant le président sortant est détesté. D'ailleurs, la FSU et Solidaires, un peu frileux au départ, ont emboîté le pas, en constatant que ces prises de positions passent très bien parmi les syndiqués.

Mais bon, mais bon, mais bon, ça fait quand  même un peu théâtre tout cela. On se demande ce que cela cache quelque part.

 

Car nous, en tous les cas, n'avons pas oublié le pas de deux de 2008-2009 ("Thibault et l'Elysée, toute une histoire", puis "Sarko/Thibault, le pacte de reconnnaissance tacite") qui avait provoqué de fortes turbulences dans la CGT à la veille du 49ème Congrès, en plein dans les restructurations massives qui ont traversé en particulier le secteur automobile en 2009. Nous n'avons pas oublié la déclaration de Thibault en 2007 qui déclarait que Sarko était "légitime" après l'élection, toutes ses tentatives durant ces deux ou trois ans pour se poser comme interlocuteur responsable et privilégié du président en place.

Il a fallu l'échec du mouvement sur les retraites, l'échec de la grève des sans-papiers, la candidature JP Delannoy au 49ème congrès pour que, sans le dire ouvertement, la confédération change son fusil d'épaule et rentre dans une posture d'opposition un peu plus marquée ("Mais qu'arrive-t-il à Bernard Thibault ?"). Auparavant, tout était fait pour tenter de négocier des miettes, en impulsant des mouvement symboliques mais qui devaient rester limités et surtout, ne pas s'élargir (cela a été le cas pour les sans-papiers, cela a également été le cas au moment des blocages des raffineries pendant le mouvement pour la retraite).

 

Alors, le petit jeu Sarko/Thibault nous laisse un peu circonspect. Bien sur, on préfère tous la franche opposition, ouverte et explicite. Mais on a du mal à y croire à fond, à imaginer une CGT de retour sur le chemin de la lutte des classes.

On voit bien la constance de la dérive CFDTisante de notre confédération (le réformisme assumé), mais on voit aussi les indécisions, les hésitations, la tactique fluctuante et pas claire, au gré des échéances et des contradictions de la lutte des classes, de la vie politique et sociale.

Nous aurons l'occasion d'y revenir à l'occasion de la succession de Bernard Thibault (qui excite les journalistes, mais pas vraiment nous...) et à l'occasion de la préparation du 50ème Congrès, mais le bilan de ce quiquennat de Sarkozy marque, pour la CGT, la succession de louvoiements et de navigation à vue sans objectif clair.

Sarko s'en va, et on ne va pas le pleurer, et on voit déjà la Confédération se mettre en posture de marche (et de collaboration conflictuelle) pour l'hypothèse Hollande - tiens, l'exigence du retour de la retraite à 60 ans n'est pas dans les dix points fondamentaux de la CGT... Un signe ? ("Hollande au meeting CGT sur les retraites ?")

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