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19 février 2008 2 19 /02 /février /2008 16:00
Mardi 19 février 2008
CCN des 29 et 30 janvier :  la CGT et les régimes spéciaux


Lors du CCN des 29 et 30 janvier, l’introduction de Michel Doneddu résume en quelques lignes la manière dont la direction de la CGT voit son attitude à l’automne lors du conflit des régimes spéciaux.

« Rappelons-nous que beaucoup d’observateurs annonçaient que Nicolas Sarkozy allait, fort de sa légitimité et de sa popularité, livrer la grande bataille des régimes spéciaux et mettre le syndicalisme à genoux – et ces observateurs pensaient bien sûr très fort à la Cgt.
Il allait dégager la voie, non seulement à la réforme du régime général, mais à l’ensemble de la déréglementation du code du Travail.
Les choses ne se sont pas passées comme cela.
Sur les régimes spéciaux, la démarche de riposte, co-élaborée par les fédérations concernées et la confédération, a refusé le piège qui aurait consisté à engager un troisième tour social.
Elle s’est attachée, vis-à-vis des agents à rester ancrée sur leurs revendications, et vis-à-vis de l’opinion à exprimer les convergences d’intérêt de tous les salariés, du public et du privé, et des retraités, la réforme des régimes spéciaux n’étant que le premier moment de celle à venir sur le régime général.
En prenant en compte dans la conduite des luttes l’état de l’opinion et le risque d’isolement, voire d’hostilité, qu’aurait provoqué une grève trop longue, nous pouvions craindre que nous nous affaiblissions nous-mêmes.
Au bout du compte, c’est le pouvoir qui sort moins fort de cette période. »


Cet argumentaire a un côté assez stupéfiant. Reprenons phrase par phrase.

« La CGT a refusé le piège d’un troisième tour social », qui « l’aurait mise à genoux ». Les seules batailles perdues d’avance sont celles qui ne sont pas engagées. La bataille n’a pas été menée, la CGT n’a pas été mise à genoux mais a gagné ses galons d’interlocuteur responsable. Mais les agents des régimes spéciaux ? Qu’en est-il ? Pourquoi le rapport n’en dit-il pas un mot ? Quelle a été la validité de la tactique de la CGT et qu’en est-il sorti ?

« La CGT s’est attachée à exprimer les convergences entre la réforme des régimes spéciaux et celle à venir sur le régime général ». Aïe, on est mal barrés… D’abord on part sur une défaite, comprise comme ça par la fraction la plus combative des salariés. Il va être désormais difficile de faire comprendre que la tactique de l’échec menée sur les régimes spéciaux peut s’avérer gagnante sur le régime général…

« En provoquant une grève longue, nous nous affaiblissions nous-mêmes ». Mais en trahissant la grève, on a découragé la fraction la plus combative et déterminée des grévistes, cette fraction seule capable d’entraîner la masse des autres. De plus, l’isolement et l’hostilité supposée n’étaient pas généraux, et chacun se rappelle d’une situation similaire au début du conflit du CPE. Cela n’a pas empêché (avant tout grâce à la jeunesse) de mobiliser progressivement et finalement de mettre le gouvernement à genoux.

Ce qu’on retient de l’attitude de la confédération, c’est qu’il vaut mieux éviter les conflits, qu’il vaut mieux céder pour éviter de perdre, et que ce qui compte finalement, c’est que « le pouvoir sort moins fort de cette période ».
D’une part, cela reste à voir. Car les attaques se poursuivent et vont très probablement reprendre au galop après les municipales, et d’un autre côté la répression frappe fort sur les militants les plus déterminés.
Ensuite, comment une direction syndicale peut-elle expliquer aux salariés qu’ils ont perdu matériellement, mais que "le pouvoir est affaibli", et que c’est le plus important ? Ils sont à ce point coupés des réalités pour ne pas comprendre ce que veut dire travailler cinq ans de plus, ce que veut dire de voir sa retraite amputée de plusieurs centaines d’euros ? D’avoir fait grève dix jours pour rien, avec les galères énormes pour les grévistes, les retenues sur salaire, les huissiers, la merde totale, et tout ça pour rien ? Qu’on ne vit pas de fierté et d’eau fraîche ? Que lorsqu’on se bat c’est pour tenter de gagner, pas pour la frime ? Qu’une grève, c’est sérieux, difficile, qu’on ne la fait pas à la légère, juste pour les beaux yeux de bureaucrates syndicaux dans leurs relations de collaboration conflictuelle avec le gouvernement et le patronat ?
La direction confédérale, non content d’avoir liquidé une grève qui pouvait gagner, justifie en plus honteusement la capitulation. Plus grave, elle théorise une attitude qui nous promet des jours sombres, si nous n’y mettons pas un coup d’arrêt.
Plus que jamais nous devons nous regrouper, nous organiser, dénoncer la CFDTisation de notre confédération, démasquer tous les discours à double face et toutes les trahisons.

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