Hier matin, profitant de la manifestation hebdomadaire des sans-papiers, un commando de miliciens CGT, cagoulés, armés de
matraques et de bombes lacrymogènes a délogé par la force les occupants de la Bourse du Travail.
Contrairement à ce que nous avons écrit hier, nos camarades n'ont pas été évacués par les CRS, mais bel et bien par le service d'ordre de la
CGT.
Ce n'est qu'ensuite que les CRS sont arrivés, compte tenu de la situation tendue qui prévalait. Il n'y a eu aucune arrestation, et tout laisse à penser que les forces de l'ordre étaient informées
à l'avance de l'opération.
On trouvera sur Libération, ainsi que sur Rue 89 des compte
rendus détaillés, ainsi que divers documents photo et vidéos pris sur le vif.
On trouvera ICI le communiqué ignoble de l'UD 75, actuellement
largement diffusé en Ile de France par les structures, qui laisse croire que ce sont des "syndicats" qui ont récupéré la Bourse du Travail ! Ignoble, le mensonge une fois de plus érigé en
politique...
On trouvera également ICI le communiqué de la Commission Administrative
de la Bourse du Travail, aucun intérêt si ce n'est d'être complètement servile. On est très, très loin du syndicalisme... On notera qu'il est signé par le secrétaire de la CA et pas
par la CA elle-même qui n'a pas été réunie pour l'occasion, mais qui, ne l'oublions quand même pas trop vite (cela pour Solidaires qui joue largement les Ponce Pilate en ce moment...) avait
exprimé il y a peu un avis légitimant à l'avance l'évacuation.
Nous ne reviendrons pas sur le débat à ce propos, nous avons publié hier, par hasard exactement au moment de l'expulsion, un article préparé depuis quelques
jours qui faisait le point. Et nous publions par ailleurs le communiqué de la CSP en réponse à cette expulsion.
L'expulsion a provoqué une vague d'indignation parmi un certain nombre de camarades de la CGT.
Et provoqué nombre de commentaires ici sur ce blog, ailleurs, comme sur Bellaciao qui a
d'ailleurs largement censuré l'événément en ne diffusant que l'information officielle de la confédération... Pour celles et ceux qui auraient encore des doutes !
L'indignation et la révolte sont légitimes, et nous les partageons bien sur, voilà des années que nous défendons l'unité de la classe ouvrière internationale.
Mais, au fond, pouvait-on attendre autre chose ? Quelque part, ce qui est étonnant, c'est que les camarades de la
CSP 75 aient pu tenir 13 mois à la Bourse, ce qui montre d'ailleurs le rapport de forces qu'ils avaient su établir !
Car connaissant la Confédération, cette évacuation était quelque part inévitable, d'autant que par ailleurs, le mouvement de grève a été proprement enterré, même si il ressurgit ici ou là...
Nous savions que l'évacuation avait déjà été programmée dès l'an dernier à la même époque (au moment ou la CGT a abandonné l'idée d'une "troisième vague" de grèves, enterrant ainsi directement l'élargissement), et qu'elle n'a été
annulée qu'une demi-heure avant du fait de la peur de bavures. On prétend même que le SO de la CGT avait eu des "états-d'âme"... on voit ce qu'il en est resté !!!
Un lecteur
parle de "social-fascisme" à propos de la CGT dans son ensemble. C'est peut-être un peu
excessif, mais il y a des traditions qui subsistent et qui font peur et pour une part la formule a du sens ! La "démocratie" à la sauce CGT, cette formule répétée mille et mille fois dans
toute la propagande n'est qu'une plaisanterie dès qu'on touche à l'orientation et au fonctionnement de la Confédération.
Nos lecteurs, les militants sont indignés. On parle de rendre sa carte, de quitter la CGT. Soit.
Mais cela renvoie à la question : pour quoi,
pour quelles motivations sommes-nous à la CGT ?
Croit-on vraiment qu'on va faire changer la confédération dans son ensemble ? Sur ce blog, nous sommes
parfaitement clairs : dans le contexte actuel de la lutte des classes, c'est tout à fait impensable. Et jamais nous n'avons laissé entendre
autre chose. Des saloperies, il y en a eu bien d'autres (l'évacuation du 9ème collectif, il y a deux ans,
l'éjection des camarades de Dalkia, le coup d'etat contre l'UL de Douai, la tentative d'exclusion des camarades de Forclum etc. etc.), et il y en aura d'autres...
Et c'est de plus en plus vrai : la CGT est de moins en moins un syndicat de militants de terrain, de plus en plus un syndicat de bureaucrates et d'experts appuyé sur une vague opinion publique
d'adhérents consultés par sondages. Nous en avons déjà parlé, c'est un enjeu du 49ème Congrès.
Alors ?
Ras le bol d'être toujours minoritaire
? Mais quand on porte un point de vue de classe, c'est et ce sera notre cas, tant qu'il n'y aura pas une situation de grands bouleversements.
C'est insupportable, j'abandonne le terrain ? Mais quand on porte un point de vue de classe, ce n'est
pas par confort intellectuel, c'est parce qu'on veut AGIR, transformer les choses autour de nous, même à petite échelle, même à contre courant, convaincre, gagner des militants, des syndicats,
avancer, quoi...
Faire l'autruche, comme beaucoup de militants pourtant honnêtes ? La résignation d'aujourd'hui
construit l'abandon de demain et la trahison d'après-demain.
Sur ce blog, voilà plus de trois ans que nous disons que l'heure n'est pas à imaginer changer la CGT, mais déjà à regrouper, construire un courant de classe dans notre syndicat. Cela veut dire
regrouper les camarades isolés, construire des réseaux, des solidarités, sur des bases solides.
Comme le dit fort justement un autre lecteur : ils sont où aujourd'hui les beaux opposants du "Tous ensemble" ???
Aussi, nous le disons solennellement.
De nombreux syndicats s'expriment en ce moment sur les journées d'action bidon, et c'est bien.
La tâche des militants de classe est donc claire : faire connaître, imposer le débat, faire prendre position. Dans
tous les syndicats d'entreprise, dans tous les syndicats professionnels, dans toutes les UL, les US, les UD, les fédérations, le débat doit avoir lieu, l'affrontement doit être visible. C'est ce que disent les lecteurs de ce blog. Et c'est ce que dit ce blog.
Car c'est au fond la même opposition :
- négocier en coulisse avec le gouvernement des miettes acceptables par le capital, le syndicalisme d'accompagnement. Les journées d'action et les Grenelle d'un côté, comme les critères Hortefeux de l'autre.
- ou organiser la lutte des classes et le rapport de forces, le mouvement d'ensemble, qu'il s'agisse contre les restructurations ou les licenciements, ou pour la régularisation de tous les sans-papiers.
de l'autre le syndicalisme de lutte de classe.
Dans tous les cas avec ou contre le capitalisme et l'impérialisme.
Aujourd'hui, tous les lecteurs du blog, tous les syndicats doivent se prononcer contre les journées bidon, contre
l'évacuation de la Bourse du Travail.
Et on verra qui défend quoi.