Lundi 17 mai 2010
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Dans un article précédent, on s'interrogeait. Est-ce
qu'on va vraiment bouger sur les retraites, ou laisser passer sans rien dire comme en 1993, ou faire semblant comme en 2003 et 2007 ? Va-t-on enfin engager le combat, tenter d'arrêter le rouleau
compresseur lancé avec le livre blanc de Rocard en 1991 ?
Après un 23 mars assez mobilisé mais en demi-teinte quand même, c'est le bide du premier mai.
Et l'annonce, d'une nouvelle journée d'action pour jeudi prochain.
Une journée d'action bidon de plus, marre de se taper la tête contre les murs
Et rebelote comme l'an dernier, les journées d'action bidon qu'on enfile comme des perles, et rebelote les mêmes contradictions :
- Soit on tape du poing sur la table et on refuse de participer à ces journées perdantes, pour manifester notre mécontentement et refuser d'être une nouvelle fois manipulés - et on reste chez soi;
- Soit on se dit que si on ne bouge pas on laisse tout passer sans rien dire et que ça sera encore plus catastrophique, et tant pis pour la manipulation;
Autour de nous, dans les boîtes, le sentiment est assez clair qu'on va encore en prendre plein la tête et que derrière les beaux discours se prépare un avenir sombre. A ce titre, la réaction est urgente, indispensable - et elle doit être forte. Et en même temps, les dirigeants qui sont supposés nous représenter, susceptibles d'entraîner des secteurs importants et donc de créer un rapport de force, ces dirigeants n'en veulent pas, mais alors là, pas du tout. Ils ne veulent que "créer une opinion", en rêvant que le patronat et le gouvernement deviendront quelque part "raisonnables"...
Beaucoup autour de nous savent que cette journée ne va servir à rien. Et pourtant, les mêmes ne veulent surtout pas rester sans rien faire, et donc ils vont sortir, quitte à servir de chair à canon à la collaboration des dirigeants confédéraux. Parce que ne rien faire, c'est renforcer la résignation et l'impuissance.
On se tape à chaque fois la tête contre les murs avec cette contradiction, on n'en sort pas.
Et pourquoi ? Parce que le syndicalisme de classe n'existe pas en tant que tel. Il n'a pas d'indépendance par rapport aux dirigeants confédéraux, il n'est pas regroupé, pas organisé, éparpillé sur tout le territoire, chacun chez soi, quand ce ne sont pas les chapelles qui empêchent l'unité.
"Tous ensemble" scande-t-on dans les manifs contre le capital. Pourquoi sommes-nous incapables de nous retrouver "tous ensemble" contre les syndicalistes collabos, pour une politique de classe indépendante ?
25% d'opposants au Congrès Confédéral, et on est incapables de se faire entendre ? De défiler derrière une banderole commune, d'afficher publiquement que nous sommes en désaccord fondamental avec ceux qui prétendent parler en notre nom ?
Dans notre bilan du Congrès, nous soulignons cette incapacité à afficher une véritable opposition de fond, après la candidature JP Delannoy.
Pour que nous ne soyons pas prisonniers de ces journées bidon, la seule issue c'est une apparition et expression commune, massive, large et sur des mots d'ordre de classe. Alors, on saura pourquoi on sort, et on ne pourra pas nous manipuler.
Cela renvoie au deuxième volet de la même question : cette opposition n'est pas unifiée sur ces fameux mots d'ordre de classe communs.
Ils ont leurs problèmes, nous avons les nôtres.
Sarkozy vient de publier sa feuille de route sur les retraites, hier soir (disponible ICI).
Habile, très habile. Il caresse habilement les syndicats dans le sens du poil en affirmant tout ce qu'il ne fera pas !!! Il maintient la retraite par répartition, il ne touche pas aux pensions, il ne veut pas augmenter les prélèvements, il n'introduira pas de "sur-décote" à 60 ans, etc. Il avance même de toucher aux hauts salaires et aux revenus du capital, de quoi vous plaignez vous ? Comme on dit, les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
Et après tout le discours sur le financement, le rallongement des trimestres etc.
On reste finalement stupéfaits du manque de réaction aujourd'hui, comme si la moitié du chemin de l'acceptation
était déjà fait !
Et tous les opposants, tous les dirigeants de se lancer dans des contre-propositions de financement, des "solutions" au problème, chiffrées ici ou là, on ne manque pas d'exemples. Bref, des contre-projets "raisonnables", "réalistes", dans le cadre de la société actuelle. C'est vrai que l'argent ne manque pas, et il est bon de multiplier les exemples pour dénoncer la caricature de cette société d'exploitation.
Mais dans un article précédent, nous avons dit que cette question des
financements ne nous intéressait guère. Nous le réaffirmons avec force, les syndicalistes de classe ne doivent pas se fourvoyer dans cette impasse. La question du financement,
c'est celle du capital, celle du rapport de force que nous saurons imposer. Après, la technique et les recettes, ils sauront bien se débrouiller comme ils savent si bien le faire quand il s'agit
des banques...
NOS problèmes à nous, ce sont nos exigences de prolétaires, de cette vie de dingue qu'on nous
impose :
- Notre problème, c'est le chômage qui maintient une fraction importante de la population, les jeunes en premier lieu, dans la misère et la dépendance;
- Notre problème, c'est l'usure de l'exploitation, physique et mentale, ce qu'on appelle la pénibilité. Quand on voit que le texte du gouvernement reprend explicitement les conceptions du Medef de l'examen de la pénibilité au cas par cas de chacun(e) et pas selon les métiers et les postes, on a tout compris : ce qu'on nous prépare c'est un statut d'invalide social individualisé;
- Notre problème, c'est qu'à partir de 55 ans on n'est plus bon à rien, réduits au chômage, à la pré-retraite ou l'invalidité, parce qu'on n'est plus assez productifs et compétitifs. Et ce n'est pas un hasard si l'espérance de vie d'un ouvrier est de sept ans inférieure à celle d'un cadre;
- Notre problème, c'est le niveau de nos salaires et de nos pensions : un retraité touche actuellement en moyenne 1212 € par mois, soit 1598€ pour les hommes, 990€ pour les femmes qui touchent donc, en moyenne, 40% de moins que les hommes ! Sur les 14 millions de retraités, 4 millions perçoivent le Minimum Contributif, soit actuellement 595,864 € par mois plus la retraite complémentaire autour de 100 €, et la moitié d’entre eux touche moins de 1000 € par mois. La situation des femmes est particulièrement difficile, 64% d’entre elles perçoivent moins de 900€ par mois, une sur trois moins de 700€. Vous croyez que c'est normal de vivre dans ces conditions ?
Voilà NOS problèmes, NOS exigences. Rien à voir avec des problèmes de financement qui ne nous concernent pas, car ils relèvent d'une société que nous rejetons en
bloc, une société fondés sur le profit, l'exploitation, la concurrence, la compétitivité... Une société dont les règles du jeu, les règles de financement et de comptabilité sont définies par nos
exploiteurs.
Nous avons des revendications claires et ce sont :
La retraite à 55 ans, pour toutes et tous, hommes et femmes, privé et public, avec ou sans papiers, sans aucune condition de trimestres;
Le salaire (et les pensions) à 1600 euros nets minimum;
Le plafonnement des pensions à (mettons, mais on pourra en discuter) à 3500 euros tout compris;
Un montant de retraite égal pour les hommes et les femmes selon la qualification et les métiers;
La réduction du temps de travail, 30h par semaine pour "Travailler tous, travailler moins et travailler autrement !"
Et comme sur tous les sujets, toutes les attaques, tous les problèmes, tout ne dépendra que de nous, de ce que nous saurons imposer.
Et donc, retour à la première partie de cet article, de ce que nous saurons construire en toute indépendance de
classe, face à Sarko/Parisot et face aux ennemis qui se cachent, les réformistes syndicaux.