Mercredi 26 Mai 2010
Retraites : une autre société pour une autre vie...
Demain, nous serons dans la rue.
Probablement pour beaucoup d'entre nous sans vraiment de convictions, en quelque sorte "la procession" alors que la messe semble dite, alors même que
nous sommes archi-convaincus de la nécessité absolue de réagir. Mais espère-t-on vraiment gagner sans lutte, une journée "d'opinion" par ci, par là, histoire de manifester son mécontentement en
imaginant qu'on va se faire entendre ? En attendant le meeting de rentrée le 14 septembre au Zénith ?
Il n'y a qu'à ouvrir les oreilles : depuis des semaines, on en parle partout. Des réunions partout. Des débats partout. Dans les entreprises, les administrations, les partis, syndicats et associations. A la télé, à la radio, dans les journaux, sur Internet. Et tout ça n'empêche pas le gouvernement d'avancer pas à pas, de préparer l'opinion, de progresser. Et toujours pas de réaction, de vraie lutte, comme on s'en doutait un peu, hélas...
Depuis des semaines, la Confédération multiplie les discussions, les arguments. Hier, dans Libération, Thibault demande "plus de temps" pour débattre : "La réforme des retraites exige tout autre chose qu’un débat à la sauvette, coupé par la trêve et conclu par un débat en urgence au Parlement en septembre". Ah, ça, la discussion ça ne manque pas, mais de combat de classe, on attend. Alors que pour le gouvernement et l'UMP, la messe est dite, que chaque jour les médias distillent le poison de l'acceptation et de l'inéluctable.
Que veut la direction confédérale ? De lutte, point, c'est assez clair. Sinon, nous aurions eu une
mobilisation un minimum sérieuse (sans même oser parler de grève générale !!!), et ce n'est pas le cas. Le sentiment c'est que ce qui intéresse nos dirigeants, c'est parler, parler, parler, avec
l'idée de créer une sorte d'opinion en imaginant faire pression sur le gouvernement et les partis lors de l'examen au parlement. Nous avons déjà dit ce qu'il fallait penser de
cette posture, qui n'a plus rien à voir avec la lutte des classes et la défense des travailleurs contre les attaques du capital. Et quand on voit que ça débouche sur une pétition calamiteuse qui se conclut par : "Je serais très attentif(ve) aux mesures que vous allez proposer et vous montre,
par ma signature, ma détermination à vouloir assurer l'avenir de ma retraite ainsi que celui de notre système solidaire", on comprend la détermination et la mobilisation proposée par la
Conf'...
Soyons honnêtes : l'argumentaire de la direction confédérale est plus travaillé que les années passées, moins
directement collabo, la critique plus incisive. Dans le communiqué à l'issue de la rencontre avec Eric Woerth, on retrouve
une série d'arguments qui sont défendables, et même en retrait par rapport aux premiers discours alarmistes du COR sur la démographie - la pression des associations et argumentaires radicaux n'y
est sans doute pas pour rien (Mélenchon par exemple, pour ne citer que le plus médiatique et pédagogue d'entre eux).
Mais on aimerait trouver à la CGT une radicalité comme celle-ci, trouvée sur le site "Retraites - Enjeux - Débats", expliquant par A + B que la question des retraites n'est pas affaire de démographie mais de richesses :
Dans son article « Financement des retraites : l’enjeu des cotisations patronales », Bernard FRIOT, professeur
d’économie et sociologie à l’université Paris X, écrivait : « On oublie toujours, quand on raisonne sur l’avenir des retraites, que le PIB progresse d’environ 1,6 % par an, en volume, et donc
qu’il double, à monnaie constante, en 40 ans. C’est pourquoi nous avons pu multiplier par 4,5 les dépenses de pension depuis 1960 ».
Pourquoi une information aussi déterminante est-elle censurée ? Parce que tout simplement un petit calcul facile, montrerait que ceux qui nous gouvernent, nous prennent pour des demeurés.
- En effet : si aujourd’hui 10 actifs produisent un gâteau de 100 et qu’ils ont à charge 4 retraités. C’est 14 personnes qui se partagent un gâteau de 100. Ainsi la part de chaque personne est de
(100 : 14) soit 7,14.
- Si dans quarante ans, 10 actifs produisent un gâteau de 200 et qu’ils ont à charge 8 retraités. Ce seront 18 personnes qui se partageront un gâteau de 200. Ainsi la part de chaque personne sera
de (200 : 18) soit 11,1.
C’est limpide ! Il sera donc possible de financer des retraites au même niveau qu’avant leurs réformes à remonter le temps.
Mais à poser le problème de cette manière, surgit directement à la question de fond, celle du partage des richesses, de la plus-value et de la productivité du travail, de la compétitivité et donc de la guerre économique, celle donc de l'exploitation capitaliste et de l'affrontement capital/travail.
La question n'est pas de savoir démontrer à Sarkozy/Parisot qu'on "pourrait faire autrement". C'est évident, les richesses existent dans la société moderne. C'est une question de société, de priorité, de choix politiques et économiques.
Demain, nous devons marcher sur NOS revendications et mots d'ordre d'ouvrier(e)s, de travailleurs(es), de prolétaires. Nous voulons la retraite pour tous et toutes, à 55 ans, sans aucune condition, car nous sommes usés, fatigués, démolis par l'exploitation capitaliste, l'intensité du travail, les horaires, le stress. Ce n'est pas un critère de pénibilité que nous voulons mettre en avant, il nous faut inverser la logique. Nous disons la retraite à 55 ans, POUR TOUS, et nous accepterons éventuellement ensuite sur cette base un critère de "ménagement" permettant à celles et ceux qui n'ont pas été abîmés par le travail de poursuivre plus tard...
Nous voulons une pension pour vivre à 1600 euros nets minimum, égale pour les hommes et femmes. Et nous voulons aussi une retraite plafonnée, pas plus de 3500 ou 4000 euros, au delà c'est indécent.
Nous voulons marcher pour dire que dans ce débat (comme dans d'autres), il ne pourra pas y avoir de victoire s'il
n'y a pas de bataille, qu'à force de reculer on ne fait que perdre, qu'il n'y a aucun arrangement possible avec nos exploiteurs.
Dans ce combat, nous disons que "cette société là, on n'en veut pas", que nous voulons remettre le monde à l'endroit, que nous voulons un monde au service du peuple et pas au service des profits, un monde où nous serons les maîtres. C'est classe contre classe qu'il faut parler des retraites, vision du monde contre vision du monde.
C'est cette orientation politico-syndicale qu'il faut avancer, c'est là-dessus qu'il faut nous regrouper, ne pas
se contenter de s'arc-bouter sur le passé, sur des calculs et des contre-plans plus ou moins raisonnables et réalistes dans le cadre du capitalisme... L'enjeu n'est pas seulement celui d'un
financement, ou même des retraites en général.
L'enjeu c'est celui du travail et de sa place dans toute une vie, des jeunes et des anciens, du partage des richesses et des priorités retenues.
Une autre société pour une autre vie... C'est cela que nous voulons, rien de moins !