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31 mars 2023 5 31 /03 /mars /2023 14:54

Vendredi 31 mars 2023

Congrès CGT : tout ça pour ça ?

 

Ainsi donc, au final et après 24 heures rocambolesques, Sophie Binet a été élue comme Secrétaire générale de la CGT.

 

Commençons par la fin. Que restera-t-il du Congrès ?

  • Le désintérêt complet de l’ensemble des syndiqués, équipes syndicales de terrain comprises pour ce congrès. Seuls quelques centaines de militant.e.s chevronné.e.s y ont vraiment participé. Les autres n’ont été que spectateurs, voire même s’en sont totalement désintéressés. On a vu des assemblées fédérales, quelques jours avant le congrès, où PERSONNE (nous répétons : personne) n’a jugé utile de soulever le sujet !!
  • Le désaveu officiel de la direction sortante avec le rejet du rapport d’activité et ainsi l’affirmation d’un syndicalisme de lutte contre un syndicalisme de compromission et d’alliances suspectes. C’est déjà au moins un pas en avant.
  • Mis à part cela, pas un millimètre en avant pour le syndicalisme de classe. Pas un mot pour les sans-papiers et l’immigration, pas un mot sur la pénibilité, silence sur la guerre, quelques banalités sur la précarité et la sous-traitance, une pseudo unanimité factice sur le féminisme, pas un mot sur les questions essentielles pour les prolétaires. C’est-à-dire qu’au final la situation n’a pas bien changé pour nous.
  • Une accumulation de magouilles, de tractations secrètes hors de la vue des délégués, pour trouver une nouvelle direction acceptable par une majorité improbable. Mais sur le fond, jamais la CGT n’a été aussi fracturée, et l’avenir promet la continuité en termes de guerres de clans, d’orientations, de chefs. Avec l’accentuation encore des contradictions internes et le pourrissement qui s’en suivra.
  • A noter néanmoins : la discrétion de la FD de la Chimie, pourtant réputée opposante ouverte qui ne s’est pas mêlée de la guerre de clans. Pourtant éliminée de la CE (depuis plusieurs congrès d’ailleurs) la FD de la Chimie ne rentre pas dans la guéguerre bureaucratique, bravo. Et la position de la FD de la Construction qui tient avec constance des positions radicales, par exemple sur la pénibilité et les retraites, sans se mêler des conflits confédéraux. Dommage qu’on ne l’entende pas plus.

Au final, tout continue (presque) comme avant…

 

Ceci étant bien posé, retour sur le sketch des dernières 24 heures.

 

Deux articles de presse bien détaillés sur ces événements, sauvegardés par nos soins
Un article du Parisien
Un article des Echos

-    Dans la nuit de mercredi à jeudi, réunion du CCN pour mettre au point la liste de la CE proposée au Congrès (oui, c’est comme ça la démocratie à la CGT, on fait une liste complète qu’on propose au vote). Après les péripéties d’usage, un vote par mandats, une liste est validée (254 voix pour, 215 contre, 13 abstentions) sans la présence d’Olivier Mateu qui a été rejeté officiellement pour des raisons statutaires (dont il était informé depuis belle lurette – il faut le souligner). Il est alors clair que le courant réformiste passera en force pour empêcher la candidature Mateu.

-    Durant la journée, vote du document d’orientation, fortement amendé, par 72% des mandats. C’est le rapport de forces réel dans la Confédération.

-    Le lendemain après-midi, la liste de la CE est soumise au vote du Congrès. On notera qu’il y a malgré tout la possibilité de rayer des noms et d’en rajouter d’autres. Mais, c’est pas simple. La séance en plénière ne se passe pas trop mal, en tous les cas plus calme qu’on pouvait l’imaginer.

-    Le dépouillement se poursuit toute la soirée, et le résultat n’est annoncé que vers 23h : la liste initiale est validée en intégralité, avec des votes très différenciés : Marie Buisson (57,23% des voix), Céline Verzeletti (77,95% des voix), Sophie Binet (86,14% des voix). Olivier Mateu, rajouté sur la liste n’obtient pas les 50% nécessaires (les rayures et rajouts se montent à environ 36% max des mandats, on y reviendra). Voir la liste complète de la CE ci-contre.

C’est donc le résultat qui est proclamé devant le congrès.

-    Dans la foulée et dans la nuit du jeudi au vendredi, la nouvelle CE se réunit pour élire la direction et le CCN se réunit en parallèle.

Le premier vote, autour de la candidature de Marie Buisson (comme prévu) a été rejeté par le CCN – ce n’est guère étonnant vu les crispations autour du rapport d’activité.

Le deuxième vote se fait autour d’un trio Céline Verzeletti – Laurent Brun – Amar Lagha. Nouveau rejet, guère étonnant. Alors qu’elle avait un potentiel de rassemblement certain, Verzeletti a fait l’erreur fondamentale de s’allier avec Amar Lagha. Outre sa tentative de putsch en début de congrès (envahissement de la tribune pour faire valider, sans succès, sa liste de délégués du Commerce), outre sa participation visible et gênante à la FSM, outre la montagne de casseroles qu’il traîne, et pas que dans le commerce (une tenace réputation de mafieux et corrompu), tout le monde sait bien dans le petit milieu confédéral que c’est juste un branleur qui ne fera rien… Exit donc le deuxième vote.

C’est de là que sort la candidature de Sophie Binet, manifestement dans l’attente du recours. Tout le monde connaît ses ambitions et son opportunisme, et elle est finalement arrivée à ses fins, en s’appuyant sur ses frictions avec Martinez et sa proximité avec Thibault (alors là, on laisse les lecteurs méditer, nous on n’a pas tout compris, mais bon – si ça se trouve juste des conflits de personne).

Le nouveau Bureau Confédéral

Sophie Binet (UGICT)
Laurent Brun (Cheminots)
Catherine Giraud (UD Haute Vienne)
Nathalie Bazire (UD Manche)
Sébastien Menesplier (Energie)
Boris Plazzi (Métallurgie)
Gérard Ré (UD Alpes Maritimes)
Mireille Stivala (Santé)
Thomas Vacheron (Textiles, cuirs...)
Céline Verzeletti (travailleurs de l'Etat)

-    Le CCN valide, le Congrès valide, alléluia, tout va bien la CGT est sauvée. Et au final on se retrouve avec une SG très peu différente de Marie Buisson… Formidable, non ? Nous mettons ci-contre la liste du nouveau bureau confédéral. Pour information, rien de spectaculaire sinon une débauche de cadres et ICT - et on a échappé à Amar Lagha !

 

Voilà, le Congrès et clos. Les cicatrices vont se refermer provisoirement, et tout va continuer comme avant.

Et pour nous, syndicalistes de classe, c’est bien toujours la reconstruction d’un syndicalisme de classe, sur le terrain qui est à l’ordre du jour, pour en finir avec tous ces clans de bureaucrates bourgeois qui se déchiquètent entre eux avec le plus grand mépris pour les prolétaires que nous sommes.
 

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