Sept semaines entre le 29 janvier et le 19 mars. Le temps de se préparer, quoi...
Ou peut-être plutôt le temps de laisser retomber la pression...
Le 29 janvier, c'était "la rage", à l'annonce des vagues de licenciements, des premières conséquences visibles de la crise. Pas vraiment une détermination structurée, pas un début de grève générale. Simplement, la colère portée au niveau de la rage. Du rejet de ce monde où on licencie en masse quand les profits augmentent. Quand on voit que les "aides" aux banques et aux industries ne vont servir en fait qu'à payer les actionnaires. La rage de l'impuissance dans un monde où l'ouvrier n'est que "ressource humaine". Où soi-disant, la réussite se mesure à 50 ans à la Rollex au poignet... La "rage", la "haine", exprimée dans les manifestations.
Aujourd'hui, la tension est un peu retombée.
Jeudi, c'est un peu la désillusion. Bon on va y aller bien sûr, parce que quelque part, il faut la réussir cette journée, il faut pas perdre la face devant Sarko et tous ses larbins. Et même pour une fois, on a les médias avec nous, qui en font la pub de cette journée, ça ne vous surprend pas quelque part ? C'est que la détermination est retombée bien bas.
On peut se gargariser de tous les discours sur l'exemple de la Guadeloupe, il n'y a qu'une seule leçon : là-bas, il y a l'arrière-plan colonial qui pousse à la révolte, et en plus il y a un syndicat de classe et de masse, largement majoritaire, qui mène la danse. Elie Domota, il ne tombe pas du ciel. C'est un dirigeant de l'UGTG, plus de 50% aux prud'hommales, ça vous dit quelque chose ? Evidemment sur la détermination, sur le déroulement et l'organisation de la lutte, c'est pas tout à fait pareil...
Ouaip... C'est ça le souci. Domota, c'est pas Thibault ou Chérèque. On va pas prendre du vocabulaire ouvrier quelque peu macho, mais il en a, lui. Ou plus exactement, le syndicat qu'il dirige (l'UGTG) est peut-être indépendantiste, mais c'est aussi et d'abord un syndicat de lutte de classe !
Nous ici, en France, c'est Chérèque qui mène la danse... C'est pour dire où on est tombés...
C'est dimanche qu'on a eu la preuve. Grand Jury RTL le Monde (on a mis le lien, mais c'est pour les masos). Chérèque y va tranquille "Oui, voilà, les journées c'est pour canaliser le mécontentement, vous savez, autrement ça pourrait exploser de manière incontrôlée". Bon, là, on vous la joue trafiquée, il a pas dit ça exactement comme ça, mais c'est le sens profond, comme on dit !
C'est sûr. Continental, les sous-traitants automobile, les licenciements partout, ça craint un peu. Sarko crache le chômage partiel à 70%, c'est pas pour rien.
Et Chérèque de poursuivre avec des perspectives exaltantes comme le premier mai, une manif à Londres (non, là, franchement, trop fort...), les élections européennes peut-être ?
Alors vous allez me dire, Chérèque, c'est la CFDT et Chérèque, pas de surprises. OK, on est d'accord.
Le souci, c'est que c'est lui qui mène la danse, manifestement. Et la CGT est au cul, ni plus ni moins, syndicalisme rassemblé oblige sans doute.
La Conf n'a rien à dire sur l'après 19 mars. Pourtant le constat est fait, jusqu'à la CE confédérale comme le note F.Dupont dans son introduction : le ras le bol augmente, la situation est mûre... et ce qui compte au final c'est... (allez, devinez, un petit effort ?) la syndicalisation !!! [vous aviez trouvé au moins, j'espère, sinon, vous êtes vraiment des nazes !]
On a simplement en vue une campagne sur l'emploi industriel entre février et juin pour proposer les bons offices des experts économiques de la CGT pour la sauvegarde du capitalisme français... Triste de chez triste... Tellement triste qu'il n'est même pas sur qu'on prenne le temps d'y revenir sur ce blog tellement ça n'intéresse et ne motive pas les militants...
Quelque part, on est mal barrés, mais on le savait déjà. La seule question intéressante aujourd'hui, c'est de savoir si les militants les plus avancés de la classe ouvrière, des travailleurs, de la CGT, seront capables ou pas de rompre avec la collaboration de classe, de la cogestion du capitalisme en crise, de rompre avec leurs directions corrompues, de réfléchir en toute indépendance à "quelque chose" d'autre pour le prolétariat, sans avoir l'esprit enchaîné au marché, à la guerre économique, la compétitivité ou on ne sait quoi...
Un seul enjeu, une seule question. Jamais la question n'a été aussi simple. Jamais la réponse n'a été aussi embrouillée... Et c'est pourtant à cette réponse que tous les articles de ce blog, section par section, tentent de répondre !