Vendredi 14 mai 2010
Sans-papiers : une approche pas vraiment "inédite"...
Les organisations réformistes (les fameux "Onze", sous la houlette de notre direction confédérale) n'en peuvent plus de trouver une issue à l'impasse dans laquelle ils ont entraîné nos camarades sans-papiers. Nous venons d'en faire le point, la situation est critique sept mois après le déclenchement de ce qu'ils appellent "l'acte II" de la lutte des sans-papiers.
Le gouvernement leur a promis une nouvelle rencontre aujourd'hui Vendredi 14 au Ministère de l'Immigration, rappelons qu'ils avaient refusé de poursuivre les rencontres avec Besson, après sa circulaire de Novembre, et s'étaient alors tournés vers le Ministère du Travail, supposé meilleur interlocuteur. Donc nouveau volte face, et ce cri du coeur : "Maintenant, il faut que les négociations aboutissent"... Mais aboutir à quoi ? Ils ont déjà abandonné la régularisation de TOUS les sans papiers... ils ont accepté les critères, sans préciser lesquels...
Alors Mercredi, sans doute avec l'espoir de se faire entendre de Sarkozy/Besson/Woerth (comme s'il n'étaient pas au courant...) appel solennel dans le journal Le Monde (texte ci-dessous).
Appel consternant, du point de vue des organisations qui se disent défendre les travailleurs.
- "Pour des critères (clairs etc.)..." c'est accepter l'expulsion, le travail au noir et la surexploitation de toutes celles et ceux qui ne rentrent pas dans ces fameux critères. Critères souhaités par ailleurs non précisés, bien sûr pour pouvoir présenter comme une victoire un éventuel futur petit accord millimétrique.
- "Appel commun (...) inédit (...) dépasse les clivages habituellement constatés" etc. Il y aurait donc un sujet, celui de l'exploitation des travailleurs sans-papiers, qui dépasserait le clivage habituel capital/travail ??? Qui mériterait une "approche commune" avec une fraction des exploiteurs, et pas des moindres, le groupe Veolia en étant l'exemple (nos camarades du CGT-E Dalkia apprécieront !).
- "Les travailleurs sans-papiers sont indispensables" à quoi ? "à l'économie", bien sûr... Et l'économie, juste en passant, c'est le capitalisme. C'est un point de vue de collaboration de classe, contre le point de vue ouvrier qui revendique la régularisation sans condition et l'égalité des droits pour renforcer notre unité contre notre ennemi commun...
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Enfin, la direction confédérale a réussi à entraîner derrière elle et à mouiller sur son orientation d'autres
syndicats et associations qui dans le passé avaient été plus radicales et attentives à garder des positions indépendantes. Oh, nous ne parlons bien sûr pas de la CFDT ou de SOS racisme, mais
par exemple des SUD-Solidaires, de RESF ou même de la Cimade. Il est temps que dans ces associations et syndicats il y ait un peu de rébellion contre ces positions !
Cet appel ne fait pas avancer d'un pouce la cause des camarades, ni même celle de notre classe en général. Au contraire, elle nous entraîne encore un peu plus de manière visible, honteuse, sur le chemin de la collaboration de classe.
La voie de l'indépendance est à construire, sur ce blog nous y travaillons avec les camarades en lutte.
Pour des critères clairs et objectifs de régularisation des travailleurs sans
papiers
LE MONDE | 12.05.10 | 15h34
L'emploi d'étrangers sans titre de séjour valable est une réalité économique aujourd'hui dans de nombreuses branches et entreprises de notre pays. Cet appel commun, inédit par la diversité de ses
signataires, est nécessité par le caractère sérieux, sensible et complexe de cette question, qui dépasse les clivages habituellement constatés dans notre société. Il ne signifie et n'entraîne en
aucune manière une communauté de vue des signataires sur quelque autre sujet que ce soit.
Afin de permettre l'effectivité de l'égalité de traitement entre les salariés, afin de lutter contre les différentes formes de "dumping social", les signataires considèrent qu'il est urgent de
formuler des critères objectifs pour la délivrance d'autorisation de travail et de séjour pour les travailleurs migrants qui en sont dépourvus. Ces critères doivent garantir l'égalité de
traitement des salariés, quelle que soit leur nationalité, quelles que soient la taille de l'entreprise et sa situation géographique sur le territoire.
Licencier, voire expulser des salariés parce que "sans papiers" ne résout rien. Car ils sont indispensables et le travail qu'ils font ne trouve pas preneur parmi les autres salariés. Sanctionner
indifféremment ou sans discernement, voire fermer, des entreprises sous prétexte qu'elles emploient des salariés sans papiers, au risque de pénaliser tous les salariés, ne résout rien non
plus.
Définir des critères de régularisation nationaux, clairs et objectifs permettra de lutter réellement contre le travail "non ou mal déclaré", qui mine l'économie et contre lequel nous nous élevons
avec force.
Les organisations syndicales et patronales intéressées à une résolution réellement pérenne de cette question doivent pouvoir aboutir au plus vite avec le gouvernement à une solution positive sur
la base de "l'approche commune" des employeurs et organisations syndicales de salariés, rendue publique le 8 mars 2010.
Les premiers signataires du texte :
Bernard Thibault , secrétaire général de la CGT ; François Chérèque, secrétaire général de la CFDT ;
Alain Olive, secrétaire général de l'UNSA ; Annick Coupé, déléguée générale Union syndicale Solidaires ; Bernadette Groison, secrétaire générale
FSU ; Pascal Decary, DRH Véolia propreté ; Sophie de Menthon, présidente Ethic ; Béatrice Bourges, secrétaire générale Entreprise et progrès ;
Jean-Marc Borello, délégué général Groupe SOS ; René Ruols, président Territoire et dialogue social ; Jean-Philippe Milesy, délégué général
Rencontres sociales ; Pierre Ferracci, président Groupe Alpha ; Charles Michalou, président Apex ; Jean-Pierre Dubois, président de la Ligue des
droits de l'homme ; Patrick Peugeot, président de la Cimade ; Richard Moyon, porte-parole RESF ; Aurélie Trouve, porte-parole Attac ;
Dominique Sopo, président SOS-Racisme ; Bernadette Hetier, co-présidente MRAP ; Christophe Deltombe, président Emmaüs France ; Alain
Supiot, professeur de droit ; Gérard Noiriel, historien ; Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France ; Edgar Morin, sociologue
; René Mouriaux, politologue ; Alain Touraine, sociologue ; Robert Castel, sociologue ; Henri Rouilleault, administrateur de
l'Insee ; Bernard Maris, économiste ; Michel Husson, économiste ; Luc Beal-Rainaldy, secrétaire national SNUTEFI-FSU ; Nathalie
Ferre, enseignante-chercheuse en droit du travail, Paris-XIII ; Emmanuel Dockes, professeur en droit du travail, Paris-X ; Frédéric Guiomard, directeur
master droit social et ressources humaines, Paris-X.