Dossiers

16 avril 2013 2 16 /04 /avril /2013 07:06

Mardi 16 avril 2013

PSA Aulnay : pourquoi la grève tient depuis trois mois ?

 

Tous les articles de ce blog sur la lutte à PSA, ICI

 

Les derniers bulletins de grève

 

Bulletin Grève 3

 

Bulletin Grève 4

 

Bulletin Grève 5

 

Bulletin Grève 6

badge Lions-copie-1Ce mardi 16, les grévistes vont fêter leur troisième mois de grève à l’usine d’Aulnay ! Trois mois, qui l’aurait cru au départ ? Trois mois de combat, de collectes, d’actions médiatiques, d’affrontements, trois mois pour refuser la fermeture de l’usine, le sort fait aux ouvriers dans la guerre économique mondialisée. Trois mois féroces, où le patron n’a finalement pour l’instant rien lâché, où les grévistes se battent comme des lions !

Où on en est concrètement ? Plus ou moins 400 ouvriers (sur 2 800 à Aulnay) sont déjà partis à Poissy, « prêtés » par Aulnay, et il se dit que la direction va augmenter les cadences là-bas pour fournir les C3 qui ne sortent plus des chaînes d’Aulnay. Aujourd’hui, pour fêter ces trois mois de grève, une délégation de Poissy viendra à Aulnay en soutien, avec une collecte de soutien aux grévistes.

Le plan PSA de suppression de plus que 11 000 postes dans le groupe divise et le patron en profite : une augmentation du temps de travail est annoncée sur Poissy, en plus des cadences accélérées avant de passer à la suppression des postes.
Du coup, il n’y a plus qu’une seule équipe désormais le matin à Aulnay, en alternance avec le chômage technique (APLD) l’après-midi.
Pourtant la grève se poursuit, avec un noyau de 180/200 grévistes, mais toujours un large soutien des non-grévistes (qui d’ailleurs ne produisent rien, aucune voiture fonctionnelle ne sort des chaînes, que des épaves).

Le noyau dur continue le mouvement, dans une ambiance de lutte (ni désespérée, ni enragée), avec une conscience aiguë de l’antagonisme avec la bourgeoisie. La conscience que de toutes les façons, ils sont cramés, que l’usine va fermer de toutes les façons et qu’il n’y a  pas de boulot derrière et que donc ils n’ont plus rien à perdre. Ils se battent contre le Patron-menteur, contre le patron qui ne lâche rien, avec l’idée de plus en  plus forte que gouvernement = patron, c’est du pareil au même.
Les-6-d-Aulnay.jpgUne des fortes motivations du combat, c’est la lutte pour l’annulation des sanctions : Sauver les huit camarades, contre lesquels des mis à pieds conservatoires ont été prononcées ainsi que deux licenciements secs ! « On ne les laissera pas seuls ! » De son côté, PSA utilise ces huit sanctionnés comme des otages : on annule si vous validez la fermeture…
Des actions partout, face au patron, au MEDEF, au gouvernement, pratiquement tous les jours. On en trouvera beaucoup d’illustrations vidéo sur le site de la CGT PSA ( ICI)
Le soutien ne faiblit pas, les collectes rentrent tous les jours, encore 6000 € à la manifestation du 9 avril, les grévistes le disent : si on tient, c’est grâce au soutien. Organisons toujours plus de collectes, partout, toujours plus de soutien !

 

 

La question c’est comment ça se fait que cette grève tienne depuis 3 mois ?
C’est inédit dans l’histoire récente du mouvement ouvrier, trois mois de grève complète, de soutien solidaire.

PSA-PS-130413.jpgUn des aspects important de cette lutte, c’est la démarcation par rapport au gouvernement. Le sentiment aigu que le vote PS n’a servi à rien, qu’ils font pareil qu’avant et qu’ils envoient les CRS « comme il faut », comme avant. La conscience que les patrons dominent la société, toute la société, le gouvernement, les médias, la police,  les lois… que le gouvernement est celui des patrons. Et que donc, maintenant, il faut compter sur ses propres forces !

Mais on n’en parle pas assez de cette grève, partout, malgré le soutien. Elle n’est pas au cœur des mobilisations partout en France, comme elle devrait l’être.
C’est que l’enjeu est politique, le même que celui de la coordination des luttes dont tout le monde parle et qui ne se fait pas : c’est ce qu’on pense du gouvernement Hollande/Montebourg/Sapin. Des amis trop mous, qui se trompent, qu’il faut éclairer et sur lesquels il faut faire pression, dans notre « camp » quand même ? Ou des ennemis qui se cachent, qui prétendent être de notre côté pour mieux faire passer toutes les attaques, des restructurations aux milliards pour le patronat en passant par l’accord précarité/flexibilité/austérité MEDEF-CFDT ?

 

L’intervention de Jean-Pierre Mercier, dirigeant de la CGT-PSA et de Lutte Ouvrière, par exemple lors du Conseil National du PS n’est pas très claire là-dessus non plus, alors que la tonalité des grévistes est vraiment bien claire - d'ailleurs tous étaient ravis de cette intervention plutôt spectaculaire.

 

Nous, nous disons : pour avancer sur nos intérêts ouvriers, les NOTRES, pour construire notre camp en toute indépendance, il faut perdre ses illusions, ne plus rien attendre de tous ces ennemis, visibles ou cachés. Il nous faut nous organiser pour nous-mêmes.

Pourtant c’est une grève inédite, absolument exemplaire, même si on peut en discuter certains aspects.
Une grève qui ne tombe pas du ciel : Dès 2007, les ouvriers avaient testé leurs forces ("Grève de classe à PSA Aulnay"), ils savaient qu’ils pouvaient compter sur 300-350 grévistes solides, des jeunes qui se connaissent, déterminés.
Et puis une équipe de militants radicaux de terrain, dans l’usine, ça donne une capacité d’organisation et de mobilisation, c’est évident, ça donne des actions quotidiennes, ça donne des assemblées, ça donne une grève organisée méthodiquement et rigoureusement (et donc la confiance aux grévistes).
Cette grève tient aussi du fait du contexte de la crise, de la conviction dans le noyau dur des grévistes qu’on s’affronte à un « système », que c’est la guerre de classe et qu’il ne faut rien lâcher, que de toutes les façons, on est déjà liquidés et qu’il faut sauver les camarades sanctionnés et la dignité de classe de tous, face à un patron pitbull.

PP5-Mars-2013.jpgDans le bulletin « Plein Phare » réalisé par des ouvriers de PSA avec des camarades de Voie Prolétarienne (voir ci-contre), un article a été particulièrement commenté par les grévistes.
Un gréviste s’adresse à ses camarades de combat « Jamais, ils n’auront le moindre respect pour nous, car ils ne sont pas là pour nous respecter. Leur seul respect est celui de leurs objectifs, et pour les atteindre, ils n’hésitent jamais à nous sacrifier. […] Mais si vous trouvez que c’est trop, et que c’est injuste, qu’il n’y a que souffrance et sacrifices…. Alors …
Alors dites-vous que dans le passé de grands bouleversements se sont produits et ont été accomplis, par la force de la volonté, et surtout par la force de la conscience. Des bouleversements qui ont amené des individus comme vous et moi, non seulement à espérer, mais aussi à obtenir ce qui nous est présenté aujourd’hui comme de la folie ou de l’impossible. »

Voilà le sens du combat des grévistes de PSA. Voilà pourquoi leur combat est le nôtre, et que ce n’est pas juste une formule. Voilà pourquoi partout nous devons faire connaître la grève, diffuser les informations (cet article en est une !), organiser des collectes, venir en délégation aux portes de l’usine, par exemple le lundi matin.
Trois mois de grève, un exemple pour tous les ouvriers en lutte pour l’emploi et au-delà pour leur libération véritable !

Partager cet article