Les Echos - 26 juin 2006
Un fidèle lecteur, à la fois du blog et du journal Les Echos, nous transmet cet article, qui illustre parfaitement les tendances actuelles sur le sujet, déjà abordées dans notre petite histoire ainsi que dans l'intervention de Ségolène Royal à ce propos.
Avec sa « sécurité sociale professionnelle », la CGT a fait mouche. Durablement. Cela fait en effet de longs mois que les partis politiques ont repéré ce concept censé répondre à l'« insécurité sociale » diagnostiquée dès la précédente campagne présidentielle. Et, loin de s'en lasser, ils semblent ne plus pouvoir s'en passer, aussi bien à droite qu'à gauche. Car, selon eux, il traduit la transformation d'un salariat de plus en plus morcelé où le CDI à vie s'efface au profit d'une succession de contrats, de stages, de formations, de plus ou moins longue durée. En vue de l'échéance de 2007, le PS et l'UMP devraient l'utiliser... pour dire des choses différentes, mais au risque, d'emblée, d'obscurcir le débat.
Dans son dernier discours à Agen, « pour la France du travail » (« Les Echos » des 23 et 24 juin), Nicolas Sarkozy s'en sert pour montrer qu'en échange de plus de flexibilité sur le marché du travail il est prêt à donner davantage de garanties aux salariés licenciés. « Au chef d'entreprise qui hésite à embaucher parce qu'il a peur de ne pas pouvoir licencier (...) je propose un contrat unique à durée indéterminée, plus souple. Au salarié qui a peur de la précarité, je propose de créer une sécurité sociale professionnelle pour sécuriser l'ensemble de son parcours professionnel plutôt que seulement son emploi du moment. »
« Rien à voir avec l'assistanat »
Qu'est-ce que cela recouvre ? Conseiller de l'UMP chargé de l'emploi, Marc-Philippe Daubresse précise : dans la lignée de l'expérience du contrat de transition professionnelle portée par le ministre de l'Emploi et de la Cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, « les licenciés économiques seraient accompagnés par un référent, l'Etat prendrait en charge leur formation, ils seraient incités à accepter des stages ou des petits boulots. A ces conditions, ils pourraient toucher, pendant un temps limité, une partie de leur salaire précédent ». Tout en reconnaissant que la formule choisie par le ministre de l'Intérieur n'est pas forcément la plus adaptée, il estime que, « en tout cas, cela n'a rien à voir avec ce que propose le PS, qui est de l'ordre de l'assistanat ».
« Mutualiser les risques »
Les socialistes en sont, eux aussi, aux tâtonnements. Principales distinctions: ils lient moins directement le dispositif à la question du licenciement, notamment en cherchant à sécuriser le parcours des jeunes dès leur entrée dans la vie active (avec l'« allocation autonomie »). Dans son projet, le PS évoque la nécessité de construire « avec les partenaires sociaux » une « sécurité professionnelle », appelée, un peu plus loin, « couverture professionnelle universelle » : celle ci « assurera les trois éléments majeurs du travail : l'emploi, une garantie de ressources et la promotion professionnelle. Dans ce cadre, nous créerons un droit individuel à la formation tout au long de la vie d'autant plus élevé que la formation initiale aura été courte. Il prendra la forme d'une "carte vitale professionnelle" ». Après la crise du CPE, on se risque moins, à gauche, à évoquer cela en contrepartie d'éventuels assouplissements du contrat de travail. Mais la question qui fâche, celle du financement de ce mécanisme, n'est pas abordée. Dans une récente interview au « Monde », Ségolène Royal soulignait la nécessité de « mutualiser les risques entre les salariés et les entreprises », une expression revendiquée par Marc-Philippe Daubresse, selon lequel « tout est question de curseur ».
CARINE FOUTEAU