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2 juillet 2013 2 02 /07 /juillet /2013 15:36

Mardi 2 juillet 2013

UL CGT de Tourcoing : un document d'orientation pour l'exemple !

 

doc-orientation-UL-Tourcoing.jpgLogo ULTourcoingL’Union Locale CGT de Tourcoing vient de tenir son congrès (le 21 juin dernier).
Pour l’occasion, elle a voté un document d’orientation – qui est vraiment important (voir ci-contre).

Important d’abord par la démarche : la plupart des organisations de la CGT refusent les débats d’orientation, « puisqu’il y a les documents confédéraux ». On se contente donc de répéter (en pire) ce qui est voté au sommet, voire même pas de débat du tout. Cela va d’ailleurs se renforcer à la suite du dernier congrès confédéral qui « verticalise » l’orientation du haut vers le bas. Les camarades de Tourcoing ont voté un « vrai » document d’orientation, qui pose un socle à leur travail d’Union Locale. Respect et félicitations, un exemple à suivre pour toutes les structures de la CGT.

Important ensuite par le contenu. C’est un texte court, pas en langue de bois, compréhensible par tout le monde, et qui pose les bases essentielles d’un travail syndical. Un texte qui se démarque de fait de l’orientation confédérale, qui affirme la réalité de la lutte des classes et l’affrontement bourgeoisie – prolétariat, que le capital et le travail ne sont pas conciliables, que le capitalisme domine toute la société et ne peut pas se réformer, que sa crise est insoluble, que le seul objectif ne peut être que celui d’une société libérée de l’exploitation capitaliste. Là encore, c’est clair, net et sans bavures, une nouvelle fois respect et félicitations. Si la majorité des structures de notre syndicat défendaient la moitié d’une telle orientation, nous pourrions vraiment parler d’une CGT de classe et de masse.
Force nous est de constater qu’une telle position est au contraire rarissime…

Important enfin par la démarche. Le document est présenté comme « modeste » quoi qu’ambitieux, et les camarades ont raison, cela correspond bien aux besoins du syndicalisme d’aujourd’hui, dans le contexte que nous connaissons. Quand en parallèle il se fixe comme objectif de faire de l’Union Locale un « pôle de résistance populaire » sur la zone de référence, dans tous les volets du travail syndical, on ne peut qu’applaudir des deux mains !

Alors, c’est vraiment en termes fraternels que nous allons discuter certains aspects de ce document. L’exercice est difficile, car nous ne voulons pas que ce débat, ces critiques, apparaissent comme un « affrontement » avec les camarades. Pour tout dire, nous aurions voté ce document d’orientation, même dans ces termes, à la fin du débat.
Mais cela n’empêche pas. Nous le répétons depuis des années, l’heure est à la confusion dans nos rangs, et donc au débat fraternel, à la confrontation, à la recherche de l’unité.

Nos remarques sont de  plusieurs ordres.

  • La première est d’ordre général, mais a de nombreuses conséquences très concrètes. Il est affirmé (avec justesse) que la crise du capitalisme est insoluble. C’est déjà une démarcation positive avec tous ceux qui prétendent que la crise n’existe pas, que c’est une invention des patrons et des bourgeois, et qu’un capitalisme à visage humain serait possible avec une meilleure gestion. Dont acte, nous partageons, et cela nous démarque de tous les réformistes, même les plus radicaux comme à Lutte Ouvrière.
    Mais l’origine de la crise est vue dans la contradiction entre production et consommation, résumée par une phrase : « Ils veulent des travailleurs à 500 euros mais des consommateurs à 3000 euros ». Or l’origine de la crise n’est pas là (même si bien sûr c’en est une manifestation visible). L’origine de la crise est dans la baisse du taux de profit, de la baisse de la rentabilité du capital face aux concurrents. Ce qui explique la fermeture des entreprises « rentables », les délocalisations, la guerre économique mondialisée pour de nouveaux marchés, de nouveaux secteurs sources de profits à la fois dans les secteurs de production comme dans les zones géographiques d’implantation.
    Une telle analyse conduit à ne voir la solution que dans une « meilleure répartition des richesses », sans remettre en cause le caractère et l’intensité de l’exploitation (travail à la chaîne, de nuit etc.), sans contester la nature de la production capitaliste (le nucléaire, la bouffe de merde, la pub, les destructions écologiques…). Elle conduit à ne voir l’impérialisme que comme une « politique » guerrière du capitalisme (c’est ce qui est présenté dans le document), alors qu’il s’agit d’un stade de développement qui associe mode de développement politique, industriel, financier et de domination du monde. Le nucléaire avec l’énergie en France, la mine d’uranium d’Arlit au Niger et la politique gouvernementale en Afrique en sont un exemple parmi d'autres.
    Les camarades de Tourcoing affirment que la crise du capitalisme est insoluble, c’est le socle indispensable et positif sur lequel il nous faut poursuivre le débat, pour savoir où nous voulons aller. Mais là, l’explication est trop simpliste – poursuivons le débat !
  • La deuxième remarque, c’est que le document est silencieux sur la lutte contre le nationalisme et le soutien aux camarades immigrés sans-papiers. Et là, franchement, nous sommes étonnés. L’UL de Tourcoing s’est clairement démarquée (et à plusieurs reprises) du nationalisme et est une des très rares UL à poursuivre concrètement la lutte pour la régularisation des camarades sans-papiers (voir par exemple ICI, comme nous l'avons souligné). C’est donc un « oubli » qui nous intrigue, dans la mesure où l’UL n’est pas susceptible de critique. S’agit-il vraiment d’un oubli ? D’une volonté de conciliation pour ne pas trop heurter certains « néo-patriotes » (nombreux, hélas, dans la région) ? Du fait que les camarades considèrent que c’est une question secondaire qui n’a pas sa place dans un document d’orientation ? D’hésitations sur la question sous la pression de courants que nous disons réactionnaires ? Non, nous ne comprenons pas trop. La lutte pour la régularisation sans condition des sans-papiers, contre le patriotisme économique et le « Fabriquons français » sont des enjeux essentiels, fondamentaux, pour le syndicalisme aujourd’hui, en cette période à la fois de mondialisation et donc de solidarité internationaliste, mais aussi en contrepoint de résurgences des pires nationalismes et courants fascistes.
  • Enfin et ce sera notre dernière remarque, nous trouvons le texte bien gentil par rapport à la Confédération. Ce qu’on peut trouver comme critique, c’est celle du réformisme, celle du syndicalisme rassemblé, et l’adhésion à la CES. Soit. Heureusement que la critique du réformisme est assez radicale pour ne pas être ambiguë, pour le reste, honnêtement camarades, ça ne mange pas de pain ! Prudence ? Ca pourrait se comprendre.  Mais quand même… Nous parlions « patriotisme économique », ça aurait mérité quelques mots sur l’emploi industriel, ou la mondialisation, la zone de Tourcoing ne manque certainement pas d’exemples… La défense de l’emploi ? Pas un mot sur l’orientation confédérale. La défense des retraites ? Pas un mot sur le bilan de 2010 alors qu’une nouvelle échéance se  profile à l’automne…
    C’est un document d’orientation modeste, et c’est un bon choix, une UL n’a pas vocation à se poser en « Confédération bis ». Mais à l’évidence on a été très (trop) prudents… Ça peut se comprendre compte tenu de l’ambiance dans la Conf, mais si l’on doit affirmer une orientation par un document, il faut quand même y mettre le minimum…

Nous ne relèverons que ces trois points (il y en aurait d'autres), le débat continue. Mais en tous les cas, il faut prendre exemple sur les camarades de Tourcoing, développer les UL en « pôles de résistance populaire », sur des bases de classes, contre toute forme d’aménagement du capitalisme !

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