Dimanche 10 octobre 2010
Mondial de l'automobile : épisode II (2010)
Une nouvelle fois, les ouvriers de l'automobile ont frappé fort vendredi dernier au Mondial 2010. Plus de 3000 ouvriers en colère, venus de toute la France ont envahi comme en 2008 le Mondial à la Porte de Versailles, et ont en quelque sorte "marqué leur territoire".
Spectacle stimulant, spectacle réjouissant, même si les manifestants étaient moitié moins nombreux qu'il y a deux ans.
N'ayant pu par nous-mêmes participer cette fois aux festivités, nous livrons dans cet article quelques éléments retrouvés sur les divers sites militants.
On trouvera sur le site de Bellaciao des témoignages, vidéos et photos de l'événement, également le compte rendu du Courrier Picard (liens sur les images ci-dessous), également sur le site des Goodyear. On trouvera une autre vidéo réalisée par les camarades de Renault Lardy, ICI.
Des articles aussi sur RTL, sur Challenges, sur l'Humanité et bien d'autres journaux.
- La presse a perfidement suggéré que tout cela était en fait très convenu, que les ouvriers ont été accueillis par le responsable du Salon et officiellement autorisés à rentrer. Plaisanterie démentie par les participants, et la vidéo du Parisien (ci-dessous) est parfaitement claire : pour rentrer il a fallu pousser, couper des chaînes et affronter les CRS. Ca n'a pas été cool du tout, mais pas du tout !
- Cette manifestation exprime la colère ouvrière face aux restructurations, aux licenciements et au bagne que constitue l'industrie automobile. Cela change des manifestations traine savates, et il y a un vrai plaisir à regarder les bourgeois se faire pourrir par les ouvriers en cortège.
Mais pour autant (et on va dire que nous sommes encore des grincheux), cela ne fait pas une perspective, pas un projet. Ce qui a réunit nos camarades (et bien sur il fallait en être...) c'est la colère et l'expression ouvrière, mais pas au delà.
La manifestation n'était pas unie, chacun avec ses mots d'ordres : "Interdiction des licenciements" d'un côté, "40 ans de chaîne c'est la haine" de l'autre, des relents de "Fabriquons français" face aux délocalisations (voir les vidéos des Goodyear) ce qui avait d'ailleurs un côté amusant quand on voit que les principales entreprises en train de restructurer sont des entreprises étrangères (Goodyear, Continental, Ford, GM, Cooper...). Mais pas de mot d'ordre central, de perspective au delà de cette soupape de colère.
C'est le drame du syndicalisme et du mouvement ouvrier français, l'incapacité de se regrouper pour construire, avec l'idée que la seule force du nombre suffira à débloquer les situations et apportera spontanément une solution.
Tout l'histoire du mouvement ouvrier prouve le contraire, en montrant qu'au final, une telle attitude laisse le champ libre aux gestionnaires syndicaux réformistes qui savent surfer sur cette colère pour la récupérer plus tard - ils savent attendre leur heure ! D'ailleurs, cette fois la manifestation était très officiellement encadrée par les Fédérations de la Métallurgie et de la Chimie, et cela n'a pas posé le moindre problème.
- Et d'ailleurs, c'est l'occasion de revenir sur le débat que nous avions soulevé autour de la venue des camarades de Ford au Salon, mais la semaine dernière (voir les articles du Parisien et de Sud-Ouest qui ont fait le compte rendu de cette visite). Nous avions critiqué la division, en soulevant l'intérêt général, contre la défense des revendications particulières - et on voit bien que ce n'est pas seulement le cas de nos camarades de Ford.
Ceux-ci s'étaient défendus avec virulence sur ce blog, en affirmant qu'ils revenaient le 8, qu'on parlait sans savoir etc... Résultats des courses (prévisible), 5 camarades seulement vendredi dernier, ce n'est pas nous qui le disons, ce sont eux. Car bien sûr, on ne peut mobiliser des centaines de camarades deux fois de suite à une semaine d'intervalle hors très dur conflit en cours...
N'aurait-il pas été possible (par exemple) de jumeler la visite commune au Mondial, avec une visite particulière à Saint-Germain en laye, siège de Ford France ?
Plus au fond, la discussion (fraternelle) que nous menons tant avec les camarades de Ford que tous les camarades présents au Mondial, c'est de savoir ce qu'on veut construire avec ces manifestations ? Des coups de colère symboliques et médiatiques, une fois de temps en temps, ou reconstruire un véritable syndicalisme de classe qui puisse contribuer à organiser la classe ouvrière, à mettre à bas ce système d'exploitation qui nous réduit à l'état d'appendices des machines ???