On le disait dans un article précédent, la Confédération est mal à l'aise après l'opération commando de la Bourse.
Oh, pas tellement par rapport aux sans-papiers, elle a développé une stratégie depuis dix huit mois qui a mené là où on en est.
Non, mais l'affaire a fait des vagues, trop de vagues. Des vagues dans les médias, des vagues dans les autres syndicats et des vagues importantes à l'intérieur même de la CGT. Nous tenons à jour, dans l'article déjà cité, la liste des réactions dont nous avons connaissance, et elle s'allonge tous les jours.
Certaines de ces réactions ne portent que sur la manière dont l'expulsion s'est faite, mais beaucoup abordent la question du soutien aux sans-papiers.
Et puis, il faut se rappeler que le prétexte de l'expulsion était de "rendre la Bourse aux travailleurs"... Or depuis l'expulsion, la Bourse du Travail, sous contrôle de la Mairie de Paris, est totalement fermée, gardée par des vigiles (avec ou sans-papiers, les vigiles ???).
Donc malaise, au minimum. Il se répand la rumeur que la Confédération n'était pas au courant de l'évacuation, décidée par la seule UD 75. Quand on connaît le fonctionnement interne de la CGT, cela fait doucement rigoler !!! Car l'affaire des sans-papiers, après la phase initiale de lancement dès 2007 impulsée en particulier par la CGT 91 (Buffalo Grill, Paristore, Metalcouleur...), a été prise en main fin 2007 directement par le bureau confédéral sous l'autorité de Francine Blanche, pour déboucher au printemps 2008 sur le lancement des "vagues" de grève limitées et sous contrôle. Mais nous avons déjà souvent parlé de cela sur ce blog...
Quant au service d'ordre qui peut croire une seule seconde qu'il puisse agir sans autorisation au sommet... La grosse blague !
Donc la CGT a donc décidé de dégager le responsable du service d'ordre. Un fusible, dont nous nous moquons. Quand on est responsable du SO de la CGT telle qu'elle est, on a ce qu'on mérite.
[Mise à jour 17 juillet] Nous prenons connaissance un peu tardivement de la "Lettre ouverte de la CSP 75 à Bernard Thibault", en date du 11 juillet, que nous mettons en ligne ci-dessous. Encore beaucoup d'illusions sur la Confédération... Pourquoi n'avoir pas fait plutôt un appel aux syndicats CGT à prendre position ? Voilà qui aurait eu un autre sens !
Boulevard du Temple, Paris
Sur le trottoir de la Bourse du Travail
Secrétaire général de la CGT
263 Rue de Paris, 93516 Montreuil cedex
Monsieur le Secrétaire général,
Comme vous le savez, depuis dix-huit jours plus de 600 travailleurs sans- papiers isolés, avec femmes et enfants, campent et continuent leur lutte sur le trottoir du boulevard du Temple, devant la Bourse du travail de Paris, à la suite de leur expulsion violente par le service d’ordre du syndicat CGT, dont vous êtes le Secrétaire général.
Nous les sans-papiers de la CSP 75 sommes décidés à continuer notre action pour exiger notre régularisation, pour dénoncer le scandale de la situation des travailleurs immigrés sans-papiers, et pour clamer notre colère contre la violence inouïe du syndicat que vous dirigez.
Il ne serait pas conséquent, de notre part, de vous laisser le bénéfice de garder le silence. Vous avez, en votre qualité, l’obligation, envers tous les travailleurs de France et notamment de la CGT, de vous exprimer sur cet événement grave.
C’est pourquoi nous vous demandons d’expliquer publiquement les raisons pour lesquelles vous n’avez pas empêché que des travailleurs sans-papiers isolés deviennent la cible privilégiée des bâtons et des lacrymogènes du service d’ordre de la CGT.
Cet événement annonce une rupture radicale au sein du monde du travail, des forces de gauche, du mouvement social et avant tout de votre syndicat, voué, depuis toujours, à la cause de l’internationalisme du monde du travail : un nombre grandissant de sections syndicales d’entreprise et de métier protestent contre notre expulsion brutale de la Maison des travailleurs parisienne et appellent à la solidarité en notre faveur.
Votre qualité vous donne toute autorité pour éclaircir une opération visant à « se faire justice » par soi-même et par la force, et cela permettra de la faire sanctionner comme il se doit, dans une société de droit.
Nous vous demandons par cette lettre ouverte d’apporter cet éclaircissement.
Pour la CSP 75
Le coordinateur, Sissoko Anzoumane
Cela dit, ce dégagement a au moins deux mérites :
- Il montre publiquement qu'il y a un problème, un malaise quelque part. La CGT ne pourra plus jamais dire que son soutien aux sans-papiers est nickel. Elle-même est obligée de reconnaître, au minimum, qu'il y a eu une bavure. A nous de nous appuyer là-dessus pour montrer que justement, ce n'était pas une bavure mais la suite logique de la manière dont la Confédération a géré le conflit.
- Il a montré que notre protestation à l'intérieur même de la CGT avait été efficace, et a produit un résultat. Protestation interne d'une part, mais rendue publique et largement diffusée d'autre part. La déclaration des camarades de Saint-Gobain a ainsi été largement diffusée, encore récemment Libération en faisait état.
La lutte des sans-papiers continue, et les syndicalistes de classe de la CGT doivent poursuivre le combat, pour l'unité de la classe, pour la libre circulation, pour la régularisation sans-condition de tous les sans-papiers.
Nous joignons ci-contre le lien vers le dernier numéro du journal de la Bourse du Travail.