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8 septembre 2008 1 08 /09 /septembre /2008 16:53
Lundi 8 Septembre 2008
7 octobre : une journée mondiale de l'indécence !

Ca y est. Le rouleau compresseur des confédérations se met en branle, CGT en tête pour organiser la "grannnnde" journée d’action « pour le travail décent », à l’appel de la Confédération Syndicale Internationale (CSI) et de la Confédération Européenne des Syndicats (CES).
Rouleau compresseur, tract déjà prêt un mois à l'avance, à tel point que la CGT alerte déjà ses organisations de ne « pas se faire déporter de faire un succès du 7 octobre » par d’autres initiatives du calendrier. Nous à la CGT, on a l’habitude de ces formules, on sait lire entre les lignes : toute autre initiative sera torpillée ou recentrée par la magouille dans le cadre de cette journée d’action pour pouvoir afficher le « succès » face aux medias…
Alors, une journée de plus, avec les éternelles questions « Y participer ou pas », et avec quel contenu éventuel ? Et bien NON. Cette fois, cette journée doit être purement et simplement boycottée, et aucun syndicaliste de classe ne peut trouver la moindre justification pour y participer.

C’est quoi le travail décent ?

La journée mondiale du TRAVAIL DECENT : c’est IGNOMIGNEUX, obscène
Mais qu’est-ce donc cette pitoyable et obséquieuse revendication mondiale à laquelle participerait la CGT ?
Cela fait mal de voir les sommets d’ineptie ou les bas fonds de la trahison que certains atteignent.
A quand un journée mondiale du travail honorable, du travail propre, du travail moral, du travail bien, du travail qui sent bon la fleur des champs, du travail généreux, du travail qui ne découvre pas le sein de la misère par décence.
Du travail décent qui puisse permettre de ne pas se balader en guenille.
Sarko pourra nous proposer ainsi son prochain slogan : Travailler plus pour s’habiller plus, pour travailler plus décemment.
Ou plus court : travailler plus pour gagner plus de travail décent...
Commentaire pris sur le site "Bellaciao".
Rien que la formule choque, comme le relève de manière particulièrement acerbe un commentaire sur le site Bellaciao (ci-contre). C’est quoi « décent » ? Une luxueuse plaquette de notre Confédération l’explique : il s’agit de « mener une vie digne correspondant à ses besoins essentiels ».
Alors, il y aurait en quelque sorte un « minimum » acceptable, une sorte de TMD (Travail minimum décent), le RMI du travail ? Selon quels critères, on se demande bien… Car les conditions de vie et de travail sont évidemment effroyables dans de nombreuses régions du monde, elles le sont aussi pour les sans-papiers, ici, en pleine métropole impérialiste, et la seule comparaison qui peut être faite est relative à l’arrogance des profits du capital, aux millions distribués dans les stocks options et les parachutes dorés, millions bien entendu extorqués dans la sueur et le sang des exploités, d’ici et des pays du Tiers-Monde. Il n’y a pas de minimum décent. Il y a l’indécence d’un capitalisme donneur de leçons aux exploités, l’indécence du RMI, du RSA, des salaires de Dacia en Roumanie ou de Nike au Vietnam, l’indécence des moralistes qui veulent adoucir la misère des exploités sans surtout toucher à la vache à lait des profits… Ce qui est indécent, c’est le capitalisme lui-même, ce qui est indécent, ce ne sont pas les inégalités, c’est l’exploitation elle-même qui en est la source, ce système fondé sur la propriété de quelques uns, mais qui exploite, régit la vie, opprime et domine l’immense majorité. Il ne peut y avoir de travail décent sous le capitalisme, et avancer cela comme mot d’ordre est de fait un appel à la résignation et au respect des lois du capital.
Mais arrêtons de nous énerver, essayons quand même de chercher un peu plus avant…

Où est l’ennemi ? Où sont les causes ?

Quand on engage un mouvement, et donc évidemment une « journée mondiale d’action » (rien que çà !), on pourrait s’attendre à comprendre quels sont les objectifs et les cibles, quelles sont les causes et les ennemis. Rien de tout cela dans la pétition de la CSI. Pas un mot dans la longue interview - toute une page - de G.Ryder secrétaire de la CSI dans le dernier numéro de « Ensemble » ( N°10 Septembre 2008) qui vient de tomber dans les boîtes aux lettres. Bien entendu, le capitalisme a disparu du vocabulaire. L’exploitation et les  profits aussi. Le patronat également. Ne restent que de pauvres malheureux qui n’ont vraiment pas de chance et pour qui il faut quand même faire quelques efforts, parce que là franchement, c’est abuser. A ceux de nos lecteurs qui croient que nous exagérons, nous donnons tous les liens des documents pour qu’ils jugent par eux-mêmes. C’est une catastrophe… Imaginer que l’on va « Améliorer les droits au travail, développer la solidarité, éradiquer la pauvreté et les inégalités » (formules reprises de la luxueuse brochure déjà citée) sans même nommer les responsables, c’est une véritable plaisanterie… indécente !
Voilà donc notre direction confédérale qui nous engage donc sur une journée d’action sans objectif clairement affiché. Les travailleurs apprécieront, les sans-papiers qui poursuivent leur grève envers et contre tout, les Goodyear qui engagent la lutte pour l’emploi après avoir refusé leurs dégradations des conditions de travail.

Comment corriger, qui sont les amis et sur quoi s’appuyer ?


En fait, pour la CSI, la CES et la direction confédérale de la CGT, le problème n’est qu’un malentendu. Il existe des institutions internationales (auxquelles justement, ces officines participent) qui ont trouvé la solution, et donc, il s’agit aujourd’hui seulement de « Changer la mondialisation », en s’appuyant sur les Nations Unies et l’Organisation Internationale du Travail…
« Seul un système international fondé sur la solidarité et le respect des droits des peuples, tels que garantis dans les conventions des Nations unies et de l’Organisation internationale du travail (OIT), peut mettre fin à ces tendances. » (texte de la pétition)
 « Pour changer la mondialisation : Depuis sa création, la CSI (Confédération Syndicale Internationale) a proposé des changements fondamentaux dans le processus de mondialisation. C’est même un des axes majeurs de notre programme fondateur. Pour réussir, la mondialisation a besoin d’intégrer une dimension sociale forte et des règles équitables ». Toujours le dernier numéro de "Ensemble".
Donc voilà nos syndicats réformistes qui imaginent changer la mondialisation (rien que çà), toujours sans parler impérialisme, exploitation, développement inégal, pillage des matières premières, interventions militaires, immigration et sur-exploitation etc. etc. En fait, « réussir la mondialisation », c’est quoi, sinon valider la domination impérialiste en évitant les révoltes qu’elle provoque ! Et c’est vers cela que nos syndicats veulent nous entraîner ?

Les modalités d’action


Cela dit, il n’y a pas panique à bord et pas le feu au lac. Car la "grannnnde" journée d’action est parfaitement bidon tout le monde le sait très bien, il s’agit juste de faire semblant.
Nous allons avoir droit en tout et pour tout à un grand meeting et concert gratuit au Trocadéro, de 17h à 19h, sur le parvis des droits de l’Homme avec tous les  pontes de la CES et de la CSI, pour « exhorter les gouvernements » à être un peu moins durs et plus raisonnables dans leur soif de profits. Pas de quoi fouetter un chat.
Plus pervers, nous allons avoir le droit aux formules dans tous les tracts, tous les journaux, toutes les grèves, tous les mouvements, pour faire croire que c’est un "grannnnd" mouvement de lutte de classe, très méchant. Ainsi cette journée mondiale devient l’axe central d’une rentrée qui masque difficilement son impuissance. Et oser intituler cela « L’heure est à la mobilisation », alors qu’il n’y a aucun objectif précis, aucun ennemi identifié (le gouvernement, le patronat), aucun mouvement de prévu… Sarkozy peut se frotter les mains et dormir sur ses deux oreilles en affirmant que plus personne ne parle des grèves… Il a raison !
Du vent, du pipeau, du baratin, tout le monde va bien rigoler, de Sarkozy à Parisot, mais en douce seulement pour ne pas fâcher des bons partenaires qui évitent ainsi l’expression de la colère des travailleurs. Mais en fait, si on réfléchit bien, même nos dirigeants confédéraux savent que c’est bidon, que c’est uniquement une manière de se faire valoir, de se gargariser et de justifier leur existence.

Journée indécente, journée de dupes… Les militants syndicalistes de classe ne le sont pas, dupes, justement. Mais maintenant, il va falloir arrêter de ricaner dans les couloirs, il faut sortir du bois, il faut aller à contre courant. Refuser ouvertement de participer à cette mascarade. Refuser explicitement toute allusion dans tracts, déclarations, ou interventions. Attaquer frontalement cette journée et l’opposer au syndicalisme de combat, à la lutte des classes symbolisée aujourd’hui par les camarades de Goodyear dont le numéro de septembre de Ensemble ne dit pas un mot, trop fort, non ? Probablement trop lutte des classes, surtout !

La vraie nature de la CSI, de la CES et du syndicalisme de cogestion

La CSI et la CES n’ont plus rien d’organisations syndicales, et ne sont que des institutions d’experts qui ne cherchent qu’à trouver leur place dans les organismes internationaux pour justifier leur existence. Elles ne sont pour l’essentiel même pas capables d’organiser la solidarité internationale la plus immédiate quand le besoin s’en fait sentir, et contrairement à toutes les affirmations, les rares manifestations de solidarité (
Dacia Roumanie, cheminots, dockers…) l’ont été à partir de liens directs et pas de l’appareil de ces structures.
Sans même parler de l’incapacité à développer des rencontres comme celle des travailleurs de l’automobile qui a eu lieu à Stuttgart l’an dernier.
La CGT s’intègre mois après  mois dans cette logique de cogestion institutionnelle, tant au plan international qu’au plan national (les divers Grenelle et négociations de Sarkozy/Fillon). Nous en voyons les méfaits au plan national, c’est l’image du syndicalisme international.
Le 49ème Congrès promet d’être chaud, puisque la direction confédérale va faire valider cette nouvelle évolution, un pas plus en avant dans la collaboration de classe… La préparation va attaquer début 2009, après les Prud’hommes, et nous allons avoir du pain sur la planche.

Alors, c’est dès à présent qu’il faut s’y préparer :

Boycottons la journée mondiale de l’indécence !
Soutenons la grève des sans-papiers et la lutte des Goodyear !
A bas la collaboration de classe !

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commentaires

L
ouaih, c'est vrai ça. pour que cette journée des glandus capote, tous au boulot demain et travaillons même plus que d'habitude. Le capitalisme tremble déjà !
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M
Dans la pétition :"Plein emploi productif" donne le "la" à l'ensemble du contenu et je n'ai pas poursuivi ma lecture. Je ne participerai pas à cette mascarade, à cette ignominie. Parler de plein emploi productif c'est être dans la ligne capitaliste, c'est donc antinomique venant de syndicats. Je trouve tout cela parfaitement INDECENT.<br /> Marie Hélène COLAIACOVO<br /> LONGWY
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O
Excellent article, ça serait bien que tout le monde le fasse tourner, histoire que cette journée fasse un bide.
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