Aujourd'hui, 29 mai, la CGT a longuement rencontré le nouveau président, après la rencontre du 14.
29 mai... Cela ne vous dit rien ? Juste deux ans, jour pour jour, que le référendum a produit un NON retentissant sur le projet de Constitution Européenne. Gageons que Thibault, fraîchement élu à
la direction de la CES ultra-favorable à cette Constitution n'en a pas soufflé mot à Sarkozy. Même si le CCN de la CGT avait appelé à voter contre, à la suite d'une pression énorme de la base des syndicats.
Mais la CGT est maintenant tellement d'accord avec la CES et l'Europe qu'on peut être sûrs que cela a été le silence radio...
Revenons à cette poignée de main. Nous nous sommes déjà interrogés sur l'opportunité de ces rencontres...
Reprenons le compte rendu que fait "Libération" du 29 mai de cette rencontre :
«Vigilance». C'est le mot employé par Bernard Thibault après plus d'une heure de discussion autour des projets de Nicolas Sarkozy sur le service minimum et les
heures supplémentaires mardi matin à l'Elysée. Les discussions avec le secrétaire général de la CGT, reçu dans le cadre des consultations avec les partenaires sociaux pilotées par l'Elysée, ont
principalement porté sur la loi-cadre sur le service minimum, préparée par le ministre du Travail Xavier Bertrand.
Ce texte en deux volets - dont Bernard Thibault a précisé qu'il pourrait être présenté en juillet - renverrait la prévention des conflits (la procédure «d'alarme sociale») à des négociations -
soit au niveau des branches, soit au niveau des entreprises - et définirait des plans de trafic en cas de grève. Sur ce second point, la loi fixerait les conditions d'implication des autorités
organisatrices des transports publics - c'est-à-dire les collectivités territoriales. «Voilà le cadre a priori du projet de loi, mais je le dis à l'issue de cet entretien, je pense que sur ce
sujet nous devons maintenir toute notre attention et notre vigilance et nous serons particulièrement attentifs au contenu de la loi et à sa rédaction très précise, a déclaré Bernard Thibault à la
presse. Dès lors que le président de la République nous dit son intention de ne pas vouloir remettre en cause le droit de grève et qu'il n'y a
aucune raison de lui faire des procès d'intention, on va essayer de le suivre, a-t-il ajouté. Mais ce sont les textes qui vont nous permettre de vérifier dans les actes qu'ils sont bien
conformes au dialogue. Nous avons réinsisté sur notre attachement aux conditions d'exercice du droit de grève telles qu'elles sont régies par les textes actuels et nous avons dit que nous
n'accepterions pas une révision dans ces domaines. L'avenir nous dira si nous allons vers une compréhension ou une incompréhension sur ce sujet».
S'agissant de la détaxation des heures supplémentaires, autre réforme emblématique pour Nicolas Sarkozy, une concertation devrait s'ouvrir «dans les tout prochains» avec le ministre de l'Economie
Jean-Louis Borloo, qui supervisera le dossier, a dit Bernard Thibault. Là encore, la CGT «attend de voir» avec la crainte d'«effets très pervers pour l'emploi» en contradiction avec le slogan
électoral de Nicolas Sarkozy: «travailler plus pour gagner plus». «Nous pensons a priori que beaucoup des salariés qui ont cru comprendre qu'ils allaient pouvoir lever la main pour faire des
heures supplémentaires, parce qu'ils estiment pouvoir en faire - je pense notamment aux salariés qui sont à à temps partiel ou qui ont des contrats qui ne leur permettent pas d'avoir un salaire
décent à la fin du mois -, vont être déçus, car les heures supplémentaires sont à la discrétion de l'employeur», a commenté Bernard Thibault.
Pour Bernard Thibault, cette réforme «peut avoir un effet très pervers». «Il peut y avoir un effet d'aubaine financier très important pour les entreprises en fonction des allègements de
cotisations. (...) Suivant la mécanique retenue, ça peut être de nature à contraindre des salariés déjà en poste à faire un grand nombre d'heures supplémentaires si les employeurs le décident, et
par contre de laisser à la porte ou de renvoyer une population intérimaire, saisonnière ou avec des contrats temporaires».
Sur la question du contrat unique, Bernard Thibault a infirmé l'hypothèse d'une conférence en janvier, comme l'avaient avancé plusieurs syndicats vendredi dernier. «Ce qui n'est pas totalement
arbitré, c'est de savoir s'il y a ou pas une conférence à la rentrée comme point de départ à des discussions ultérieures ou si c'est par le biais de négociations bilatérales employeur-syndicats
que les choses devront progresser», a-t-il dit. En clair, le scepticisme prédomine à la CGT, qui s'attend à être «très largement déçue» le 1er juillet, échéance pour une possible revalorisation
du smic, écartée par le nouvel exécutif. Je reste «tout à fait lucide sur le fait que la philosophie politique de ce gouvernement est - jusqu'à ce qu'on nous fasse une démonstration contraire -
plus proche des thèses du Medef que des nôtres», a affirmé Bernard Thibault. La présidente du Medef, Laurence Parisot, sera pour sa part reçue mercredi à l'Elysée.
"Interrogation", "vigilance", "pas de procès d'intention", "on attend de voir", "lucide", "pas d'opposition au service minimum", "une réforme qui
peut avoir des effets pervers", STOP ! On arrête là ! On n'est plus dans le domaine du syndicalisme, mais dans celui du fayotage
! Le nouveau président, le nouveau premier ministre, Sarkozy + Fillon sont déjà connus. Ils ont fait leur preuves. Il n'y a aucun procès d'intention à affirmer que leur plan est la mise au pas du
syndicalisme, comme petits caniches bien gentils, toujours au pied et jamais prêts à mordre. Leur objectif est la réforme des relations sociales pour les rendre encore plus flexibles, encore plus
souples pour s'adapter aux exigences de la guerre économique mondiale. C'est le sens du contrat unique, de la flexisécurité, des heures supplémentaires. Pour cela, ils ont besoin de la paix sociale (ils ont tiré la leçon du CPE). Il faut donc caresser dans le sens du poil les centrales
syndicales réformistes, probablement en échange de quelques os à ronger en matière de paritarisme et de dialogue social sans enjeu.
Bernard Thibault est à fond dans le jeu. Non pas parce qu'il est magouillé ou naïf. Non. Parce que la direction confédérale de la CGT n'est absolument plus dans l'optique de la lutte des classes
(rappelons que la formule avait disparu du projet de document d'orientation au 48ème Congrès) mais de la
cogestion, du dialogue social, de la "collaboration conflictuelle"...
Décidément, alors que c'est le droit de grève qui en cause dans la fonction publique, on aurait pu s'attendre à mieux que le renvoi entreprise par entreprise... On aurait pu s'attendre à une
réaction confédérale importante, à un appel à la mobilisation.
On a comme d'habitude un texte conciliant, prêt à discuter, prêt à négocier. Au fait ? On négocie quoi avec un Kärcher ?