Mardi 18 mai 2021
Rassemblement des entreprises en lutte à Gardanne (13) le 20 mai
A l’initiative de la CGT des Bouches du Rhône et d’un certain nombre d’entreprises en lutte essentiellement pour l’emploi, un rassemblement se tiendra le 20 mai à la centrale thermique de Gardanne (13), menacée de fermeture.
En ces périodes de disette syndicale de notre Confédération, on ne peut que se féliciter de ces initiatives et appeler à y participer le plus largement possible, comme aux manifestations pour l’emploi organisées par la CGT-TUI (prochaine manifestation prévue le 12 juin à Paris, voir l’appel à la précédente « Samedi 23 janvier : manifestation pour en finir avec les licenciements »).
Depuis le début de la pandémie, la confédération a quasiment disparu des écrans radars, plongée dans de multiples luttes internes, confrontée à une chute importante des cotisations et sans projet unificateur. Hormis les interventions de Martinez dans les médias, et la pathétique campagne pour les élections aux TPE pour sauver une représentativité défaillante, la CGT – comme confédération – n’est plus là pour les salariés.
Heureusement qu’il y a encore les syndicats locaux qui se battent pour l’emploi, contre la précarité, et quelques structures un peu importantes toujours mobilisées !!
En fait, cette rencontre des luttes est à l'initiative des signataires de l'appel "Pour une CGT à la hauteur des enjeux de la période", et nous profitons de l’occasion pour y revenir.
On trouvera ci-contre le lien vers l’appel complet, déjà signé par plus de 1200 syndicalistes CGT, essentiellement de la Chimie, du Commerce, des Services Publics, de la région PACA et autres syndicalistes souvent liés à la FSM.
L’appel se situe explicitement avec comme perspective le prochain congrès de la CGT l’an prochain au printemps. Il fait un constat tranché de la situation économique et sociale, en posant la nécessité d’un changement de la société qui doit commencer par « une riposte à un niveau inédit ». Sans appeler à rejoindre la FSM (ce qui ferait grincer quelques dents), l’appel s’oppose clairement aux orientations de la CES tout en affirmant en général la nécessité d’une lutte au niveau international.
A quelques réserves près, la première partie de ce texte qui décrit l’attaque patronale et gouvernementale est assez consensuelle parmi les militants les plus combatifs de la CGT, ceux qui se revendiquent, même de manière confuse, de la lutte des classes et d’un « changement de système », pour « mettre à bas le pouvoir du capital ».
La deuxième partie de l’appel se veut une plateforme radicale pour « organiser la lutte interprofessionnelle » et « organiser la riposte générale ». C’est une bonne idée, c’est ce que nous défendons depuis des années (voir par exemple « La proposition de plateforme en débat » au Forum pour un syndicalisme de classe et de masse en 2007). Mais c’est aussi une question difficile, parce que le contenu d’une plateforme soulève en fait toutes les grandes questions d’orientation syndicale – et donc aussi toutes les contradictions qui peuvent exister dans nos rangs. On ne va pas se cacher derrière son petit doigt.
Et c’est là qu’on voit que le texte de l’appel, vendu « clé en mains » laisse apparaître des soucis.
Sans vouloir démolir le projet et la perspective, soulignons quand même
- L’absence de la domination impérialiste, et les conséquences en termes de solidarité internationale, en particulier dans les grands monopoles.
- Le silence complet sur la pénibilité et la sous-traitance, volets clés des restructurations et de l’exploitation capitaliste.
- Le silence sur toutes les questions écologiques et environnementales, les sujets qui fâchent donc, comme le nucléaire, la question du progrès et du productivisme, sans pour autant tomber dans une décroissance réactionnaire. Alors que ce sont de plus en plus des enjeux essentiels du combat syndical et politique.
- La référence à l’arrêt des licenciements et à la restitution des aides publiques (voir notre article sur la mobilisation des TUI, en lien plus haut)
- Les illusions sur l’appareil d’Etat capitaliste et « la réappropriation collective des secteurs stratégiques pour notre souveraineté » dont on s’interroge sur ce que ça peut bien vouloir dire dans un Etat capitaliste-impérialiste.
- Le silence dévastateur sur la gouvernance de la CGT et de ses structures, la démocratie interne, la corruption ouverte ou masquée, la bureaucratie et la délégation… Alors qu’y compris certaines structures partie prenantes de l’appel sont concernées (le Commerce pour ne pas le nommer – voir notre dossier).
On en restera là pour l’instant, mais il y aurait bien d’autres thèmes à aborder.
On voit qu’à l’évidence il y a un problème de méthode. On nous propose une plateforme clés en mains, sans débat, sans possibilité d’amélioration et de confrontation, de manière tout aussi bureaucratique qu’au niveau confédéral. Les vieilles méthodes à l’ancienne quoi…
Plus personne ne peut accepter ce style de débat, cette volonté hégémonique d’imposer une orientation masquée par le seul fait du nombre des signatures.
Une des raisons des problèmes internes de la CGT, c’est la CONFUSION sur l’orientation. Et ça ne se règlera pas en cherchant à IMPOSER une position, mais par l’organisation du débat de fond. C’est cela qui doit être au cœur de la démarche nécessaire : dégager les grands thèmes nécessaires, organiser des débats et forums, cerner les positions alternatives, les confronter démocratiquement, les voter dans la clarté.
Pour une CGT à la hauteur des enjeux de la période, il faut en passer par là. Toute volonté de s’imposer sans débat est vouée à l’échec, tôt ou tard.