Mercredi 9 décembre 2015
La CGT et le vote aux régionales
Depuis cinq ans, la Confédération a entamé le combat de fond contre l’extrême-droite, sa présence dans nos rangs, et ses idées qui divisent le monde du travail. Nous l’avons relaté sur ce blog avec ses hauts et ses bas (voir la section de ce blog « La présence du FN dans la CGT »). Mais on peut dire que le ménage commence à être fait sérieusement, et qu’il n’y a aujourd’hui plus de silence honteux qu’on a pu connaître dans les années précédentes.
Pour ces élections régionales, la CGT est restée prudemment (et à juste titre) en retrait, on n’a pas vu ces listes de responsables diffusées pour un vote (Front de Gauche bien sûr, voir un article de 2012 « La CGT avec Mélenchon ? ») ou un autre… Encore que la manœuvre tombe de plus en plus en désuétude…
Mais la Confédération a produit deux communiqués (voir ci-contre), l’un à la veille des élections pour appeler à voter contre le FN, l’autre au lendemain pour ré-itérer son opposition, sans afficher nettement une position électorale. Nous reproduisons ces documents, ils peuvent servir pour alimenter le débat autour de nous, alors que rares sont les syndicats et structures à se prononcer de manière autonome.
Mais avec quelques remarques quand même, et d’importance.
1) Le FN c’est une grave menace pour la démocratie et le monde du travail, un parti de régression sociale. Donc "voter pour ce parti, c’est se tirer une balle dans le pied".
On ne peut bien sûr qu’être d’accord. Au-delà des incohérences du FN, il mettra au final en œuvre un programme ultra-libéral intégré au capitalisme, quoiqu’il en dise : les règles du jeu de la guerre économique mondialisée s’imposeront à lui, comme elles se sont imposées au PS, à l’UMP ou à tous les gestionnaires des municipalités, du secteur coopératif ou mutualiste etc.
Le FN est bien un parti ultra-réactionnaire, mais pourquoi dire alors que « ce n’est pas un parti comme les autres » ?
Qui a mis en œuvre jusqu’à aujourd’hui les lois anti-immigrés ? Qui a voté l'ANI et les lois Macron ? Qui autorise les licenciements massifs et les fermetures d'entreprises ? Qui va réformer le Code du Travail ? Qui a instauré l’état d’urgence et va renforcer toutes les mesures répressives ? Qui fait la guerre en Afghanistan, au Rwanda, en Syrie ou en Irak, au Mali ou en Afrique ? PS et UMP en alternance tranquille… Et aujourd’hui, on voudrait nous faire voter pour les uns ou les autres pour nous protéger du FN ? C’est une plaisanterie ?
Alors certes, le FN est « encore plus » réactionnaire (vis-à-vis des femmes, des sans-papiers, des migrants…), mais au risque de déplaire c’est un parti « comme les autres » avec ses particularités.
2) Ce qu’il y a c’est que le FN traîne avec lui tout ce que la réaction a de plus immonde. La Marche pour tous, les anti-avortement, les identitaires qui ratonnent les immigrés, les racistes bas du front, les nostalgiques des colonies, les fachos à croix gammée, les jaunes et milices d’entreprise (ceux qui ont tué Pierre Overney et Pierre Maître) et ainsi de suite. Cela fait peur, c’est clair. Cela peut justifier une mobilisation particulière, mais certainement pas d’imaginer qu’il y a une « muraille » soi-disant « républicaine » entre eux et les autres. Ce sont les flics de Pasqua qui ont tué Malik Oussekine, et ceux de Valls qui ont tué Rémi Fraisse, n’oublions pas ! Il va y avoir un combat particulier contre le FN chaque fois que nécessaire, et il faut en être, mais nous n’en sommes certainement pas à imaginer une quelconque alliance, ne serait-ce qu’électorale, avec l’un ou l’autre de nos ennemis ! Car les ennemis aujourd’hui, il ne faut pas se tromper, ils sont au gouvernement !
3) Ce qui explique l’abstention, en particulier dans les milieux populaires et parmi les jeunes. Nombre de camarades de travail autour de nous ne vont plus voter parce qu’ils font le bilan des partis politiciens, et on les comprend ! Lorsque la CGT nous dit que « Voter c’est un acte pour la démocratie », en rappelant que le droit de vote n’existe pas dans de nombreux pays, elle oublie de dire que la « démocratie » dans notre pays n’a plus rien de révolutionnaire depuis belle lurette, qu’elle est pourrissante… Et que de plus en plus de prolétaires n’y croient plus du tout !
Nous partageons le point de vue confédéral que c’est dans la lutte économique et sociale que le combat doit se mener, dans la mobilisation populaire. Oui, c’est dans la défense intransigeante des intérêts des travailleurs que nous devons nous affirmer en dénonçant toutes les mesures régressives de tous les partis aux manettes. Mais en rompant clairement et nettement avec toutes les versions de la cogestion du capitalisme et toutes les illusions d’un capitalisme à visage humain, sans exploitation…
Nous devons afficher nos drapeaux :
Défendons l’intérêt des travailleurs, et rien d’autre !
Non à l’intérêt national, à l’union nationale, oui à l’unité des travailleurs !
Non au nationalisme et au souverainisme, vive l’unité internationale et multinationale des prolétaires !
Non à l’état d’urgence, droit de réunion et de manifestation, non à la répression, défendons les inculpés !