Mardi 27 janvier 2015
Fin de récré à la direction de la CGT
Depuis la CE de début janvier (voir ICI), de l’eau a coulé sous les ponts, en particulier avec le CCN du 13 et les soubresauts qui ont suivi. Les tueries de Charlie Hebdo et de l’épicerie cacher ont un peu étouffé les scandales, et au final, il n’est pas si mal de laisser le temps au temps et de ne pas toujours réagir à chaud. Pour comprendre, c’est bien d’avoir un peu de recul !
Le CCN du 13 janvier
Le CCN a donc balayé les prétentions de Thierry Lepaon à continuer de manipuler en arrière-plan, et a retoqué sa proposition de future direction (voir un article des Echos, ici, pour le détail).
Non sans quelques moments « démocratiques » qui révèlent la nature véritable de ce qu’est la direction centrale de la CGT, pour l’essentiel : un rassemblement de barons bureaucrates, attachés à la défense collective et individuelle de leurs privilèges, dans le cadre d’une conception d'un syndicalisme de réforme du capitalisme et de cogestion via l’ensemble du système paritaire. On a ainsi vu la secrétaire de la fédération de la Santé voter POUR le projet Lepaon, alors qu’elle était formellement mandatée pour voter CONTRE, et on découvre au passage qu’elle est la compagne de Martinez, futur secrétaire « pressenti », comme le dit la langue de bois. On découvre ensuite, grâce aux camarades de la Métallurgie que le secrétaire de l’UD du Nord, qui a également voté POUR le projet Lepaon, était lui aussi mandaté pour s’y opposer (voir ci-contre).
Nous invitons vraiment les camarades à consulter les votes des structures, dans le fichier compilé ci-contre à gauche (merci à Cyril Lazaro !). D’ailleurs cela permet de mesurer la prétendue opposition de l’Agro qui a voté POUR le projet Lepaon au nom de la lutte contre le réformisme (authentique !), une fédération prétendument hyper-radicale, qui adhère à la FSM et tout et tout… Donc camarades, allez vérifier, et demandez des comptes, comme le font les camarades de la Santé (leur congrès en mars va être tendu…) ou ceux de l'USTM du Nord.
Martinez prépare la fin de la récré
Le projet Lepaon a été adopté par seulement 57% des voix dans ces conditions truquées, il a donc été rejeté, puisqu’il n’atteint pas le seuil statutaire des 2/3. Malgré tous les efforts de l’ancien trésorier, magouilleur devant l’éternel, le fameux Donneddu qui a par exemple tenté de faire croire que la majorité simple suffisait. Mais la courte majorité obtenue grâce aux votes truqués a permis malgré tout à Martinez de prendre la main pour se placer, et être validé pour construire la future direction confédérale. Et déjà, c’est lui qui a représenté la CGT aux vœux de Hollande…
Il fallait vite donner les apparences du retour à la normale ! De débat de fond, point ! Un congrès extraordinaire ? Pas question, c’est le congrès ordinaire qui aura lieu en mars 2016.
Habile le Martinez. La commission qu’il s’adjoint est élargie, avec la présence de trois camarades réputés critiques, à des degrés divers, dont Gisèle Vidalet (on trouvera sa déclaration du 19 décembre ICI sur la compilation d’un précédent article). Et il surfe habilement sur le ras le bol qui s’étend dans toute la CGT autour du bazar au sommet.
[mise à jour 29/01] Nous publions ci-contre le texte d'introduction de Martinez à la CE d'aujourd'hui (qui vient de valider largement l'équipe qu'il propose) qui confirme à 100% nos dires.
La critique sur le fond est rare, on en reste en gros au « rejet des positions réformistes qui nous mènent dans une impasse » pour reprendre des formulations lues ici ou là. Mais quelles sont ces positions réformistes, au-delà de se coucher devant Hollande ?
Dans un précédent article (« CGT : crise d’orientation derrière la crise de direction ») nous disions qu’il n’y avait pas grand-chose à attendre du CCN et de l’ensemble des directions de la CGT, et nous relevions l’ensemble des débats qu’il faut avoir. Aujourd’hui, on n’a pas abordé le début d’une virgule de ces problèmes de fond de l’orientation de la CGT, même pas l’attitude à l’égard du gouvernement Hollande…
D’où la lassitude des militants face à ce qui apparaît comme des magouilles au sommet, le réflexe « légitimiste » qui pousse à tout oublier et à retourner dans les manifs comme cette semaine sur la loi Macron, ou les manifestations de l’Energie et des Cheminots de jeudi.
Martinez est habile, il va proposer une nouvelle direction plus ou moins équilibrée, représentative des divers courants, et en gros, la CE comme le CCN vont la valider à quelques exceptions près. Et on va fermer le ban, passer à autre chose, en essayant d’oublier au plus vite l’épisode Lepaon…
Le Congrès extraordinaire
Nous l’avons dit, l’hypothèse d’un congrès extraordinaire a été rejetée, alors qu’elle était très populaire dans notre syndicat, pour mettre les choses à plat, pour clarifier (voir ci-contre à gauche une deuxième compilation de déclarations de syndicats depuis début janvier). Le congrès aura lieu en mars 2016, comme prévu.
Il ne s’agit pas d’une question de date, mais d’ordre du jour : un congrès extraordinaire traite d’une question extraordinaire, et pas de l’ordinaire du syndicat. Refuser cette hypothèse comme l’a fait la CE et le CCN, c’est étouffer le débat de fond, la critique, et rien d’étonnant au sommet de la CGT où, comme nous l’avons déjà dit, ils se tiennent tous par la barbichette. On notera la constance de certains, comme l’UD des Bouches du Rhône, qui refusent de s’aligner et persistent à en revendiquer la tenue (voir ci-contre à droite).
Pourtant, le 51ème congrès de 2016 va être rock’roll, parce que l’affaire Lepaon va être là, et bien là. Alors, à tous les syndicalistes de classe de le transformer en tribune de dénonciation de l’orientation réformiste qui domine à la tête de notre confédération. A nous de dénoncer, les illusions de réforme du capitalisme, du nationalisme économique, la soumission à l’acceptation de la précarité, de la pénibilité pour ne négocier que la couleur de nos chaînes. A nous de contester le système paritaire qui n’est que la cogestion des affaires du capital avec le MEDEF, même si cette cogestion est conflictuelle. A nous de remettre sur la table la lutte contre la précarité et la sous-traitance, le combat contre la pénibilité et la souffrance au travail, l’internationalisme contre la mondialisation capitaliste et contre le nationalisme, des orientations qui attaquent au cœur du capitalisme et de l’exploitation.
A nous d’accumuler les débats de fond et les forces pour faire de ce 51ème congrès, si nous le voulons, si nous le pouvons aussi (là, ce n’est pas gagné, il faut l’admettre…) un véritable congrès extraordinaire !